Le choix que je n'ai pas fait - ft KYO

ne matinée qui s'annonçait paisible pourtant. Si agréable et légère, comme chaque jeudi depuis ton arrivée dans le petit quartier tranquille de Tokyo. Un réveil duveteux comme tu les aimais, emmitouflée dans ta couette, les yeux qui s'ouvrent doucement, une vraie petite souris ! Une boisson chaude prise dans le café d'en bas, une petite brise fraîche sur les joues avant de t'installer dans un cybercafé pour la lecture de tes mails, ton petit rituel avant d'aller faire du lèche vitrine le long d'une rue marchande qui rejoignait le vendeur ambulant de Takoyaki que tu aimais tant.

L'été était là, malgré une chaleur étouffante, tu avais suivi ton parcours avec assiduité en terminant par un bubble tea et des mochis, essayant de te maitriser pour le boire chez toi et pas avant ! Tu avais tes habitudes, tes lieux de prédilections, tu étais presque réglé comme du papier à musique. N'aimant pas particulièrement changer d'habitude.
Pour dire, tu avais presque une routine "confort" : bubble tea, mochis, plaid favoris, temps idéal, température optimale, selfcare, bref, tout était bien rodé et listé proprement dans ta tête. Chaque émotion avait sa boisson, chaque sentiment avait son rituel.

Ton humeur était à la joie et à la paix, il le fallait. La sérénité avant tout, un état d'esprit sain et sans interférence. Mais ce jeudi allait tourner à la catastrophe plus vite que tu ne l'aurais souhaité. Quoique tu n'aurais clairement pas voulu qu'il y ait un tel retournement de situation après tout.

De retour à ton immeuble et sans changer tes habitudes, tu avais ramassé ton courrier et l'avais posé sur la table basse avant d'aller te préparer une omelette et quelques crudités. L'assiette prête, posée sur la table, tu ouvrais les enveloppes une à une. Jusqu'à ce rose. Un rose bonbon que tu n'avais jamais reçu, que tu ne pensais pas recevoir, pas aussi tôt, pas après la décision prise quelques semaine auparavant. C'était quand même une sacré blague.

Ton humeur dégringolait pour s'écraser au sol comme un avion en papier, le nez tout plié. Tu déglutissais en décollant le rabat. Chaque mots semblait surréaliste mais ce qui t'avait le plus interpellé c'était le nom de ton époux. Un Tokugawa ? Ca n'était visiblement pas Ryo, et tu chassais rapidement l'idée qu'il s'agisse d'un membre de sa famille, après tout, le Japon, c'était grand et ils n'avaient pas l'exclusivité de ce nom.

Un rapide saut sur le net pour faire une recherche sur cet homme, tout le monde était sur le net, il ne ferait donc pas exception. Un mec qui faisait de la musique, des photos, des vidéos, il semblait populaire, être quelqu'un de solaire, avenant. Avec une appréhension certaine, tu comparais ta tendance à rester en retrait à son potentiel charisme. Etait-ce réellement compatible ?

Néanmoins, après avoir terminé tes investigations, tes yeux se posaient sur ton assiette sans appétit, puis sur l'ensemble de ton appartement décoré de manière à te sentir bien, chez toi. Il faudrait tout recommencer, possiblement te heurter à des conflits énormes aussi. Tu devais te tenir prête, établir un plan de bataille pour ne pas te retrouver dans une position inconfortable. A commencer par le déménagement, tu te devais d'investir les lieux en premier, trouver un endroit ou te retrancher au besoin, tout faire pour ne pas créer de tension inutile lié à un environnement en désordre.

En un bon et un tour de bras tu avais contacté un déménageur, les avais attendu, donné tes instructions et tes clefs, fais une valise et pris la route vers votre logement d'un pas décidé. Enfin... C'était sans compter sur la localisation du dit logement... totalement perdu au fin-fond de Tokyo. Contrainte de prendre un taxi, tu désespérais a mesure que celui ci s'éloignait des grands bâtiments du centre ville.

Ainsi, tu étais plantée devant l'immeuble, jugeant de sa hauteur, de l'environnement plus "rural" que ce à quoi tu t'étais habitué depuis quelques années. Ca te rappelait presque ton île natale, si on considérait la baie de Tokyo comme la mer à Okinawa, la verdure environnante et le calme.

Un moment d'hésitation, un élan de courage donné et te voilà partie. Tu poussais la porte d'entrée et observais les lieux avec fascination et crainte entremêlées. L'ascenseur grimpait au fur et à mesure pour t'emmener au dernier palier. Un duplex lumineux avec une vue imprenable. Immense lieu de vie dans lequel tu te sentis si petite, perdue dans les grandeurs. Le souffle presque coupé, tu te sentais étouffer dans cet endroit impersonnel, presque aseptisé.

Un pas en arrière, tu te sentais faiblir mais rapidement sortie de ta torpeur par la vibration de ton portable dans ta poche. Ryotaro. Comment faisait-il pour toujours appeler au bon moment ? avait-il une petite antenne qui lui faisait sentir quand tu n'allais pas bien ? Tu n'avais pourtant prévenu personne jusqu'à maintenant.

Un appel des plus classique, une prise de nouvelles qui virait aux larmes et à la désorientation, un appel à l'aide nerveux et biaisé par ton sentiment contrarié, l'impression de devoir subir une situation t'était intolérable. Lorsqu'il te proposa naturellement de te rejoindre, tu refusais cependant, tu devrais affronter ça comme une grande, ses paroles réconfortantes avaient réussi à te calmer, un peu, assez pour te permettre de reprendre un peu le dessus.

Les déménageurs n'arriveraient pas avant quelques heures avec tes effets, il te faudrait donc combler le temps.