Ume - [100 % de fiche]

Ume est née dans une famille qui ne l’attendait pas. Deuxième enfant et dernière, elle est arrivée comme un cheveu sur la soupe ! Mais “un joli cheveu” avait dit madame Yoshikawa, qui pensait ne jamais pouvoir redonner la vie à cause de ses problèmes de fertilité. Avant elle il y a Naora, de quatre ans son aînée, pour qui avoir une petite sœur n’avait jamais été au programme. Mais cela n’empêcha pas la famille de bien s’entendre, de la première crise de larme d’enfant car : « Ume elle prend toute ton attention maman » à la dernière : « Naora a jeté monsieur pinou par la fenêtre !!! ». L’enfance d’Ume fut douce, jusqu’à ce que l’adolescence se pointe en même temps que le déménagement de la famille.

A douze ans, jamais Ume n’avait autant détesté le travail de son père. Travaillant pour le gouvernement, muté à Tokyo, si le changement n’avait pas fait peur aux filles en arrivant dans une aussi grande ville (venant auparavant d’une petite commune plus au Nord du pays) grandir allait peut-être devenir sportif. Si Naora avait tout du physique japonais “standard”, Ume avait à l’inverse hérité des gènes européens de sa mère. Pour ses yeux, c’était une de ses fiertés, mais pour sa poitrine, à aucun moment cela n’avait été au programme. Le complexe devenait énorme, sans mauvais jeux de mots, rendant jalouses certaines filles de sa classe, curieux d’autres pervers dont les hormones étaient en électrons libres. Les problèmes commencèrent à partir de ce moment-là. Et à ses quinze ans, on la fit changer d’école. Sa mère regrettait de n’avoir rien vu pendant ses dernières années, Ume s’en voulait un peu aussi de n’avoir rien dit, mais les brimades de ses camarades étaient son quotidien et avec le temps étaient devenues “normales”.

Ce n’est qu’une fois dans un nouvel établissement que la jeune femme comprit qu’elle aurait pu, non, elle aurait dû dénoncer ses harceleurs plus tôt. « Tout ça parce que tu avais des seins plus gros qu’elles ? » oui, ça pouvait être ridicule, mais c’était la réalité. Réalité que ses nouveaux camarades de classe trouvaient aberrante. Dans cette nouvelle école, tout était différent. Plus calme, plus cadré…jamais Ume n’aurait pu imaginer que cela était possible. Pouvant réellement se concentrer sur ses études, se lançant dans des activités grâces à ses premières amies, c’est là, pour la première fois, qu’Ume prit goût dans quelque chose : la couture. Elle rencontra aussi ses premiers amours et allant de pair, ses premiers chagrins.

A dix neuf ans, les complexes la rattrapèrent une fois de plus. Elle avait la tête sous l’eau, ne sachant pas quoi faire de sa vie professionnelle, de son dos qui lui provoquait des douleurs et des remarques qu’elle se reprenait alors qu’elle venait de se faire embaucher en travail du soir dans un petit konbini en bas de chez elle. Le problème n’était pas les clients, mais certaines personnes qui parfois l’attendaient et lui faisaient remarquer qu’elle avait des allures d’actrice porno. Un comble, à croire que les gens étaient nés pour être mesquins mais lorsqu’un gars lui montra une photo sur son téléphone, elle comprit qu’elle allait effectivement en baver encore quelque temps : une certaine “Hoshi” jeune actrice de film X lui ressemblait quasiment traits pour traits, poitrine incluse. Ume espérait qu’elle serait comme beaucoup, une actrice parmi tant d'autres et qu’elle changerait de look assez rapidement pour sa filmographie.

Et le travail dans ce konbini dura plus longtemps que prévu. Ne sachant pas dans quelle école aller, ne souhaitant pas être la honte de sa famille, elle avait accepté le contrat à temps plein que l’employeur lui proposait. Ce n’était pas mirobolant mais ça payait. Elle se paya son premier appartement et de son temps libre, elle s'adonnait à la couture. Elle avait une amie qui était dans le cosplay, chose qu’Ume n’aurait jamais osé porter, mais elle aimait l’aider dans la confection de sa passion. Cela allait de la tenue la plus simple à la plus complexe, Ume adorant gérer toute la partie broderie et perles des costumes de princesses.

C’est cette même amie qui lui offrit également une perspective d’avenir : devenir couturière. Si elle se renseigna sur le métier en premier temps, curieuse et étonnée elle-même de ne pas y avoir pensé avant, ce qui la faisait rêver dans cette optique était la mode avec un grand M. Pouvait-elle seulement y prétendre ? Poussée par ses amies et par sa propre sœur qui voyait les choses encore plus grand qu’elle, elle prépara surtout un book et profita de son travail pour mettre de côté. Au programme, Ume espérait pouvoir prétendre intégrer une des plus grandes écoles de couture du pays : le BUNKA Fashion College.

Tout ceci ne se fit pas en un jour, mais bien en quasi deux ans et demi. Naora l’aida financièrement, prétextant : « Quand tu seras connue et riche, je récupérerais tout avec des intérêts. » Et elles en rigolaient, alors que la candidature de notre jeune femme était retenue. Sa filière : le département accessoires de mode et textiles ! Et ce fut comme un rêve éveillé jusqu’à sa dernière année, trois ans plus tard, qui tourna au cauchemar. 12 octobre 2109. Une date qui a marqué le pays tout entier. Par miracle, notre jeune femme n’avait rien, si ce n’était que quelques contusions après avoir réchappé à l’effondrement de son immeuble. C’est l’immeuble voisin qui a commencé et avec le bruit, la panique, même de nuit, certains voisins avaient été réactifs et avaient quitté leur domicile pour éviter l’effet domino qui a tout de même eu lieu.

Si Ume avait eu cette chance, sa sœur, à l'autre bout de la ville, beaucoup moins. Coincée sous les gravats, les secours ne retrouveront sont corps que cinq jours plus tard, inerte. Sa mère avait été dans le coma pendant deux mois suite à cet incident, son père s'en sortant indemne également. Un miracle lorsque l'on voyait toutes les familles qui avaient été décimées ce jour-là. Seulement les séquelles, pour tout le monde, seraient irréparables. Un enfer, qu'Ume arrivait à calmer uniquement en s'épuisant : sport, sortie, soirée arrosée, coucherie...il lui arrivait de coudre et de coudre jusqu'à ce que ses yeux n'en puissent plus et que ses doigts tremblent. La commémoration, un an plus tard, n'aida pas spécialement au deuil et faisait au contraire remonter des souvenirs plus douloureux que joyeux. Pourtant, un verre à la main, elle trinquait avec elle : « Je vais tout donner, tu verras. J'ai pu terminer mes études, avec du retard, mais...c'est bon, je n'ai plus qu'à me faire un nom ! »

Et effectivement, Ume donna tout ce qu'elle avait. Nuit et jour, elle concevait, confectionnait ce qu'elle savait faire de mieux. Mais le psy qui la suivait la sentait de plus en plus frustrée. Si le deuil commençait à s'estomper, il y avait autre chose qui naissait au fond d'elle. Lever le pied n'était pas une option. Mais changer d'air, ça...C'est une amie qui lui souffla sa prochaine destination : la France ! Si elle ne parlait pas un mot de la langue, ce n'était pas ça qui allait la gêner dans son projet. Elle allait se former à la dentelle et pour cela il n'y avait qu'un seul pays qui était valable pour parfaire ses techniques. Elle y passa quelques longs mois et cela lui fit le plus grand bien. Elle revint au pays pile pendant le dysfonctionnement de la machine. System error ? Elle ne se sentait pas concernée, ses parents non plus qui avaient une routine quasi militaire, mais elle se questionnait : elle était un peu plus jeune lorsque les Incontrôlables avaient fait leur apparition, même démantelée, elle se souvenait très bien de leur motivation. Etait-ce eux, dans l'ombre ? Vu qu'aucun communiqué pointant du doigt cette hypothèse ne verra le jour, cette histoire lui passa au dessus, elle était de toute façon beaucoup trop plongée dans un projet énorme en collaboration avec des anciens de sa promo.

Projet qui verra le jour en janvier 2112. Les puces défaillantes, le Japon avait un grand besoin de se vider l'esprit. La mode, au même titre que tout amusement quelconque, faisait beaucoup de bruit avec les problèmes du quotidien. Associée à des couturiers engagés pour ce défilé, cette représentation fit beaucoup de bruit et grâce à ça, Ume fut mise sur le devant de la scène. En effet, l'événement avait eu lieu non loin du siège du gouvernement et le thème était : "la beauté dans la souffrance". Les créations représentées parlaient surtout du silence des Japonais sur le système, de Soosaku et récemment, de la défaillance des puces. Cela avait été la pièce maîtresse du défilé, qui avait été un challenge mettant les nerfs des couturiers à rude épreuve. Tout le défilé avait été préparé pendant des mois et pourtant, ils n'avaient eu que quelques pauvres semaines suite à l'annonce de l'état pour créer de toute pièce une tenue homme et une femme pour le bouquet final.

Si Ume avait pris du plaisir, elle s'était surtout fait des contacts. Et en moins d'un an, elle passait de couturière en bas de l'échelle à celle qu'il fallait pour se permettre d'être estampillé défilé de luxe. Elle n'en revenait pas, c'était un rêve éveillé. Mais tout rêve à ses défauts et dans un monde tel que la mode il n'y a pas de pitié. Elle rencontra des hommes, des femmes, qui ne virent en elle que le profit. Si cela pouvait l'arranger, elle tomba dans la spirale infernale de n'être qu'une jolie poupée. Utile pour la confection, jolie pour prendre son pied au lit ou au bras dans une soirée.  

Aujourd'hui, elle travaille toujours en freelance, très demandée, elle a tout de même espoir de pouvoir s'associer avec quelqu'un et de pouvoir monter sa propre boite. Elle vise plus haut, pour elle, mais aussi pour sa sœur. Elle veut devenir un nom qui résonnera au même titre que les plus grands dans le monde et elle fera tout pour s'en donner les moyens.