— Just Married —
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16/09/2017
Les plus du perso :
Je suis: anti-Incontestable.
Époux/se : Célibataire.
Autre: Remerciements, big up, infos à savoir ?
Kyle A. Inagawa
Akira Inagawa
Ou l'art d'être authentique en étant faux.
Informations générales
Nom : Inagawa. Une chance ou un boulet, j'avoue que je ne sais pas vraiment. Ça doit dépendre des circonstances. Parfois j'aime bien. Très souvent, j'aimerais m'appeler autrement.
Prénom.s : Kyle, Akira. Mais pour toi mon chou, ce sera Akira. C'est beau nan ? Comme vous l'aimez. Belle assonance en "a", ça fait poétique. Akira. Parce que tout le monde me connait comme ça. T'as pas besoin de vérifier ma carte d'identité, Akira, ça suffira. Oui je me répète.
Âge : Le quart de siècle approche, c'est un beau petit bout de chemin. Vingt-quatre jusqu'au treize novembre. Je suis né en deux mille quatre-vingt-six.
Genre : Je me désaperai pas pour faire plaisir à tes yeux, darling. Mais si tu veux vérifier en privé...
Origines : Alors, dans l'arbre généalogique, il y a une branche qui part un peu à l'ouest et qui arrive jusqu'à moi. Cette branche, c'est celle de ma mère, irlandaise. L'autre branche, c'est celle de mon père. Elle est pas très intéressante. Il était japonais.
Activité : Je suis consultant commercial, diplômé en commerce, spécialisé en économie et management. Et je suis bon si je puis dire. Mais j'ai aussi été plus ou moins encouragé à travailler pour ma « famille », l'Inagawa-kai. On ne peut pas avoir le nom et ne pas en faire partie semblerait-il. Les responsabilités, c'est bien beau, mais je laisserais volontiers ma place à d'autres si me laissait le choix.
Sexualité : Hum. Je me fiche pas mal de tout ça. J'veux dire, hey ! J'm'attache pas. Alors un mec, une femme... Peu importe.
Avatar : Sombre inconnu
Réglement :
Chemin Version 2.0
Autre : Ça fait un moment que je pars sur une base de deux posts alors je suis désolée mais à force, plus vraiment aussi /mur. Certains l'ont aperçu celui-là, rien de trop différent même s'il y a quand même quelques nouveautés. Coucou Al'
Prénom.s : Kyle, Akira. Mais pour toi mon chou, ce sera Akira. C'est beau nan ? Comme vous l'aimez. Belle assonance en "a", ça fait poétique. Akira. Parce que tout le monde me connait comme ça. T'as pas besoin de vérifier ma carte d'identité, Akira, ça suffira. Oui je me répète.
Âge : Le quart de siècle approche, c'est un beau petit bout de chemin. Vingt-quatre jusqu'au treize novembre. Je suis né en deux mille quatre-vingt-six.
Genre : Je me désaperai pas pour faire plaisir à tes yeux, darling. Mais si tu veux vérifier en privé...
Origines : Alors, dans l'arbre généalogique, il y a une branche qui part un peu à l'ouest et qui arrive jusqu'à moi. Cette branche, c'est celle de ma mère, irlandaise. L'autre branche, c'est celle de mon père. Elle est pas très intéressante. Il était japonais.
Activité : Je suis consultant commercial, diplômé en commerce, spécialisé en économie et management. Et je suis bon si je puis dire. Mais j'ai aussi été plus ou moins encouragé à travailler pour ma « famille », l'Inagawa-kai. On ne peut pas avoir le nom et ne pas en faire partie semblerait-il. Les responsabilités, c'est bien beau, mais je laisserais volontiers ma place à d'autres si me laissait le choix.
Sexualité : Hum. Je me fiche pas mal de tout ça. J'veux dire, hey ! J'm'attache pas. Alors un mec, une femme... Peu importe.
Avatar : Sombre inconnu
Réglement :
Chemin Version 2.0
Autre : Ça fait un moment que je pars sur une base de deux posts alors je suis désolée mais à force, plus vraiment aussi /mur. Certains l'ont aperçu celui-là, rien de trop différent même s'il y a quand même quelques nouveautés. Coucou Al'
Where did I come from ?
Franchement, je ne sais pas pourquoi je suis là. Je ne sais même pas pourquoi j’ai accepté d’écouter les bêtises d’Aisling et de venir ici. Elle est persuadée que ça ne peut que me faire du bien, que j’aurais peut-être une révélation qui ferait de moi un type un peu moins con, moins égoïste, moins… Moins beaucoup de choses en fait. Je crois qu’elle ne me supporte que parce qu’on est jumeaux. Quoiqu’il en soit, je suis là et rien ne change. Ça m’étonne pas tellement. Aux dernières nouvelles, je suis vivant. Je crois pas que parler aux morts ait un quelconque pouvoir libérateur. Au contraire, c’est assez glauque. Mais soit. Pour la paix que ma sœur me donnera ensuite, je peux bien me forcer. Imaginer que tu es là Yukino, et non que je suis en train de parler à de foutues cendres – qui ne sont même pas les tiennes d’ailleurs – en me demandant si elles feraient un bon terreau. Je vais faire comme si tu étais là et je vais commencer par le début de l’histoire. Celle où personne ne bouffe les pissenlits par la racine, celle où personne autour de moi ne tombe comme une pathétique mouche. Ça fait bien une belle histoire non ? Celles qui ne commencent pas toujours de façon idyllique mais qui finissent par des protagonistes qui vomissent des arcs-en-ciel de bonheur parce que tout est bien qui finit bien. Ces histoires là sont des rêves. Et j’ai vite appris que les rêves étaient faits pour être brisés. Certains plus vite que d’autres, et quand tu as de la chance, tu crèves avant qu’on ne te les fasse disparaître. Si je voulais être dramatique, je dirais que mon histoire est celle des rêves brisés. Mais je suis pas tellement dans le drama, plus dans le sarcasme. Alors je ne dirais pas que mon histoire c’est ça. Je dirais plutôt que c’est l’histoire du mec qui a décidé de vivre et plus de subir. Ou survivre peut-être. Ce monde est une arène de gladiateurs.
Arène privée, le grand empereur ordinateur observe à travers ses circuits grillés ces deux combattants qui font leur entrée. À l’intérieur, Dawn. Dawn Kyliann Boyle. Elle a vingt-et-un ans, pianiste virtuose qui a du succès. Intelligente et bête à la fois, trop naïve sans doute, aveuglée par un pays dont la beauté n’existe pas. Elle finit par quitter sa belle Irlande pour un Japon apparemment plus beau dont elle est tombée amoureuse. Je cherche la beauté. C’est peut-être tout le maquillage par-dessus la dictature, mais alors elle serait tombée amoureuse d’une beauté superficielle. Elle ne veut pas chercher Dawn. Elle croit que la puce est la solution. Elle veut la paire parfaite. Folie oui, on lui a dit. Mais elle n’a pas changé d’avis. Elle est la gaijin bien aimable, charmante, charmeuse. Elle a ce regard franc et pétillant, rempli de défi, rempli de vie. Cette chevelure rousse qui fait qu’on la voit partout où elle passe. Elle captive, elle attire. Charmante, charmeuse. Charmée. Elle est sensuelle Dawn, envoûtante, enjôleuse. Elle a ce quelque chose qui fait qu’elle passe pour exotique plutôt que pour étrangère. Ça fait plus beau. Ça la rend plus belle. C’est ça qui l’attire lui.
Lui, il est avant tout eux. On ne le connaît pas lui d’abord. Plutôt son géniteur. Le chef. Inagawa. Ceux-là. Lui, il est de ceux-là, il est ceux-là. Il est l’honneur, le respect. De la famille mais pas des règles. Rebelle. Ça me fait chier de le dire, mais ce trait de caractère me vient probablement de là. Lui, il est sauvage. Lui, il est indomptable. Animal sauvage qui n’a jamais connu de cage. Tatsuya Inagawa. Il est le premier, l’aîné. Il est jeune, il a la vie devant lui, l’influence de son nom entre les mains. Il l’aime cette influence. Elle lui donne l’impression d’avoir du pouvoir et il aime ça. Il ne se conforme pas, il fait ce qu’il lui plaît et il le fait quand il veut. Il ne se soumet qu’aux ordres de ses supérieurs dans la famille. Avocat, il connaît le droit sur le bout des doigts. Personne ne peut le tenir hormis l’ordinateur. Il n’a pas encore la trentaine, il est vif et il place ses pions intelligemment pour se faire une place au sein de la famille. C’est un électron libre. Il s’accroche quelque part mais change très vite d’atome. Le dernier en date s’appelait Dawn. Leur rencontre était peut-être écrite quelque part. Elle était peut-être inévitable. C’est ce que ma mère croyait en tout cas. Pour moi, ça n’était que des bêtises, mais je me suis contenté de le penser. Si elle charme, lui n’est pas en reste non plus. Il profite de sa jeunesse, chérit sa liberté.
Et puis il finit par la rencontrer.
Elle n’est pas contaminée par le virus des écrans, pour elle, c’est encore normal de sortir et de voir du monde. C’est encore normal de traîner dans les bars, pour se rappeler les pubs irlandais. Lui, il a passé sa journée devant un écran. Il veut se changer les idées. Il fait ça souvent. Il faut bien qu’il sorte pour rencontrer des gens. Alors il sort. Et ce soir-là, ils se trouvent. Il est une proie pour elle, elle est une cible pour lui. Il s’approche plein d’assurance, elle le regarde avec curiosité. Ils se jaugent un instant, avant qu’elle ne l’invite à s’asseoir. Et tout commence par un verre. Ils discutent, font vaguement connaissance. Ils se ressemblent au fond. Ils font une bonne paire. Des rires, des mains qui se touchent plus longtemps qu’elles ne le devraient, des verres qui se succèdent et des contacts plus appuyés. L’intérêt envers l’autre est partagé et ils sont bien décidés à l’explorer. Ils sont jeunes, ils veulent s’amuser. Ils font une bonne paire oui. Ils n’envisageaient pas que ce serait pour plus d’une nuit.
L’enveloppe rose. Elle est ravie, il est détruit. L’animal a soudainement été mis en cage. Il ne sait pas que c’est elle, ni elle que c’est lui. Ils se sont connus le temps d’une nuit alcoolisée, les souvenirs sont vagues, les noms depuis longtemps oubliés. Ce n’était pas important pour ce qu’ils avaient à faire. Alors la surprise est grande lorsqu’ils se retrouvent, non pas chez eux mais derrière les barreaux du centre de redressement. Lorsqu’ils se redécouvrent, lorsqu’ils se reconnaissent. Lorsqu’ils réalisent qu’ils pourront se supporter mais probablement pas s’aimer. Il est en colère. Il a l’impression qu’on lui a soudainement coupé les ailes. Comme toujours, il se rebelle. Pourquoi lui ? Pourquoi pas un autre ? Et elle, si heureuse, commence à déchanter. Ses rêves et illusions sont brisés. Elle se rend compte que le mariage ne sera peut-être pas l’idylle. Tatsuya – mon père – nous disait souvent à Ais et moi que ce jour avait été le pire de son existence. Je veux bien le croire. Ce sera le pire de la mienne aussi. Et ça me dégoûte un peu. De lui ressembler autant. Le grand-père le répète sans arrêt. Mais pour en revenir à mes parents, l’union n’est pas parfaite. Ils sortent à la limite de la dernière semaine, avant qu’il ne soit trop tard. Une routine s’installe ensuite. Ils ne s’aiment pas, mais ne se détestent pas non plus. Ils ont des accords non dits. Cordialité. Ils se supportent. Tous les jours ne sont pas roses, mais ça va. Au moins, ils ont un bon terrain d’entente : la chambre. Là-dessus, pas de doute sur leur bonne compatibilité. Ça ne suffit pas à ma mère, beaucoup trop romantique, mais c’est déjà ça. Leur entente a duré quelques temps. Jusqu’à. Jusqu’à.
Vous devrez avoir un enfant.
Pour lui, c’est trop. La consigne est claire. Trop. Elle l’a rendu fou. Il veut résister. Il refuse de se plier à une volonté qui n’est pas la sienne. Alors il commence à tarder dans les rapports. Une fois, il rate la deadline. Ils passent à nouveau par la case prison. Il s’en fout, il résiste. Même si pour ça, il doit coucher avec sa femme sous le regard attentif de miliciens. Mais la fin du délai donné pour la conception de l’enfant approche. Quelqu’un doit intervenir. Et ce quelqu’un, ce sera son père à lui. Il ordonne, en tant que chef, pas en tant que père. Il ne laissera pas son fils se tuer bêtement, certainement pas. Tatsuya obéit. Il n’a plus le choix. Alors le treize novembre deux mille quatre-vingt-six, Aisling Akane Inagawa et moi, Kyle Akira Inagawa voyons le jour, après avoir été conçus des mois plus tôt lors d’un dernier passage en prison. Là, les choses sont devenues un peu plus compliquées. Et tu sais quoi ? C’était de notre faute à ma sœur et moi.
Le problème tu vois, au-delà de la grossesse ordonnée, c’est le fait qu’il n’y ait pas eu un seul mais deux enfants. Ma mère était ravie elle, mais mon père pas vraiment. Un seul, peut-être aurait-il pu gérer. Mais deux ? Et il ne comprenait pas que ça ne dérange pas ma mère. Alors ça a engendré des disputes. La bonne entente au lit ne suffisait plus à arrondir les bords d’un mariage bien trop bancal dès le départ. Et si au début, ni ma sœur ni moi ne pouvions saisir l’étendue et la profondeur du problème, la compréhension du fait que nous étions le problème est venue très vite. Beaucoup trop vite. L’ancien n’appréciait pas spécialement ma mère. Il aurait aimé une fille du pays pour son fils. À ses yeux, Dawn était une vulgaire étrangère et non une jeune femme exotique, comme tendait à le penser la majorité des gens qui la côtoyait. Elle n’avait pas la culture, ni du pays, et encore moins du clan Inagawa, le noyau et pas l’ensemble de la famille. Elle ne se faisait pas aux règles, aux traditions et le grand-père n’aimait pas ça. Dès le départ, les relations avec le reste de la famille étaient compliquées. Mais s’il ne voulait pas de ma mère, il n’avait rien contre ma sœur et moi, ses petits enfants, contrairement à mon père qui ne voulait de nous pour rien au monde. Alors je crois que c’est assez naturellement que j’ai développé un complexe d’Œdipe. Mon père n’aimait pas ma mère, alors qui pouvait l’aimer mieux que moi ? J’ai été la victime de service dès que j’ai commencé à aller à l’école. Bousculades, moqueries, cheveux tirés. Et ma réaction ? Je pleurais bien sûr. Je finissais toujours dans les jupes de ma mère, pour qu’elle me réconforte, pour qu’elle m’aime. Et moi, je l’aimais autant voire plus en retour. J’étais le p’tit chéri de sa maman, qui venait pleurer dans ses jupes dès que ça n’allait pas. Alors au fond, j’avais un intérêt à être embêté tous les jours. Ma mère ne pouvait pas faire autrement que s’intéresser à moi. Dès lors, mon père m’avait jugé comme étant faible. Le mec qui plus tard ne serait « qu’une foutue pédale sans la moindre virilité ». Ses prédictions n’étaient pas totalement fausses. Pas totalement. Mais il est vrai que je n’avais pas une once de force à l’époque. D’ailleurs, je n’avais absolument rien pour moi. Contrairement à ma sœur qui avait hérité du regard émeraude de ma mère, moi… C’était compliqué. Je n’ai pas eu la peau laiteuse, ni la chevelure de jais. Moi, je tapais plus dans le poil de carotte, Mérida. Roux quoi. Le visage parsemé de taches de rousseur. Bref, la totale. Les gens ont toujours eu du mal à croire en ma gémellité avec Aisling. Et ça n’avait rien d’étonnant. On a les mêmes yeux, et quelques traits en commun. C’est tout. Donc tu vois, moi je me pointe tout bien habillé à l’école – dès mes trois ans d’ailleurs, je ne remercierai jamais assez ma mère – et d’office, je me retrouve à l’écart à cause de mon apparente rousseur, mon apparence qui me donne un genre indéfini – ça m'a rendu audacieux, je peux te l'assurer, les débuts de l'exhibitionisme –, et qui montre clairement que je ne suis pas à cent pour cent du pays. Je fais tâche. Et non seulement je suis une tâche à l’école, mais je suis aussi une erreur à la maison. Combien de fois n’ai-je pas entendu ces mots ? Et combien de fois n’ai-je pas pleuré pour tous ces mots ?
Quand à seulement trois ans, tu as déjà conscience d’être le vilain petit canard parce qu’on te le dit chaque jour, quand à seulement trois ans, tu as déjà conscience d’être un indésirable, que t’as jamais été voulu, quand tu sens sur toi le regard plein de dégoût d’une des seules personnes que tu veux impressionner, que son regard seul te tatoue la peau de mots. Boulet. Raté. Indésirable. Idiot. Imbécile. Faible. Bon à rien. Pédale. Ça, dès le plus jeune âge, je t’assure que ce n’est pas agréable. C’était mon quotidien. Les moqueries des gosses de mon âge passaient encore, j’avais ma douce et aimante mère pour me réconforter et me faire sentir comme si j’étais le roi du monde. Le plus dur, c’était vraiment mon père. Que je lui ressemble comme a l’air de le croire le vieux ou pas aujourd’hui ne change rien au fait que j’aie appris à le détester dès le départ. Et ce n’est pas que je le voulais. Au contraire. Pendant un moment, il a été mon modèle. Pas parce qu’il était exceptionnel non, mais juste parce qu’il était mon père. Je voulais qu’il me remarque, qu’il me considère. Qu’il reconnaisse mon existence. Je faisais tout – et j’ai toujours cette habitude – pour être le meilleur. Je donnais toujours mon maximum, pour espérer l’impressionner. Juste un peu. Un tout petit peu. Mais un père comme le mien t’oblige à te contenter de rien. Naïvement, bêtement même, je croyais qu’il m’aimerait. C’est ce que l’être humain recherche partout non, quand il veut que l’autre l’accepte ? L’amour. Foutue connerie. Mais je le cherchais chez mon père. Je voulais être aimé autant que moi j’étais capable d’aimer. Parce que je l’aimais tu sais ? C’était filial peut-être, mais un amour qui n’est pas réciproque, je connais. Alors j’ai forcé. Longtemps. Je ne voulais pas accepter le rejet. Le rejet. C’est un horrible sentiment tu sais ? J’ai l’impression qu’il me suit, me colle à la peau et ne me lâchera jamais. Je le refusais mais le rejet a fini s’installer en moi. Lorsque pour la première fois, Tatsuya Inagawa a levé la main sur moi. C’était pour une broutille, une bêtise sans importance. Mais il ne m’a pas raté. Ni les fois suivantes. Jamais en fait. Je crois qu’il en tirait un certain plaisir. Si je pouvais lui rendre, crois-moi, je n’hésiterai pas. Ma mère a essayé de me préserver. Un peu. Du rejet, des « corrections », comme le disait si bien mon père, quand elle l’a découvert. Découvert oui. Jouer un rôle, pour moi, ça a commencé là. Avec autant d’années d’expérience, c’est facile de nager dans la fausseté et d’avoir l’air vrai. Je ne voulais pas que ma mère sache, parce que lorsqu’elle voyait des bleus sur ma peau, elle n’était plus heureuse. Et pour mon moi de l’époque, ce n’était pas concevable puisque je devais la rendre heureuse. Alors je cachais. Je jouais la comédie. À trois, quatre piges seulement ? Oui. Certaines circonstances obligent à comprendre les choses tôt. Souvent beaucoup trop. Pour mon père, c’était l’éducation à la Inagawa. J’avais encore l’âge de pleurer pour rien et de chier dans ma couche – pas littéralement hein, je n’en portais plus, quand même – mais pour lui, fallait que je sois fort. Sinon, j’étais encore plus inutile. Aisling y a échappé à ce traitement. Un peu. Un peu, parce qu’il l’aimait un peu. Mais tu sais, même ça, au fond, tant que j’avais ma mère, ça allait. Tant qu’elle était là.
Ma mère. Elle m’a couvé. Autant que possible. Elle était toujours là. Mais rien ne dure jamais. Rien ne dure vraiment. Quand j’avais cinq ans, et que je commençais à me faire bouffer de tous les côtés, elle était là. Elle était là pour m’aimer. Je courais toujours vers elle. Toujours. Je pouvais être naïf, innocent, pleurer comme je voulais, elle était là, pour me consoler, et je l’ai compris après, pour me protéger. Je pourrais chanter ses louanges longtemps, mais y a ce sentiment un peu pervers en moi qui au fond m’en rend incapable. L’amertume sans doute. On est très amis elle et moi. Pour en revenir au point, je l’aimais ma mère. Et dès le départ, j’étais persuadé que mon père ne la méritait pas. Pas parce que j’étais complexé et amoureux d’elle en bon p’tit gars que j’étais, mais parce que mon père m’en faisait voir de toutes les couleurs, et que je voulais ou non, mon regard sur les choses s’aiguisait, et je voyais bien qu’ils étaient trop différents tous les deux. Mais que peut-on attendre d’un vulgaire circuit électrique après tout ? Rien de fou. Un mariage comme celui de mes parents. Même si elle l’a cherché, ma mère aurait mérité tellement mieux. Tout ce qui me passionne – me passionnait – me vient d’elle. Pour prendre soin de ma sœur et moi, elle avait mis sa carrière en pause et était devenue professeur à la place. J’étais son premier élève et de loin le plus assidu. Logique, je pouvais passer encore plus de temps avec elle comme ça, plus qu’elle ne passait de temps avec ma sœur qui je crois m’en a un peu voulu pendant quelques temps. Et puis, j’aimais vraiment le piano. Cette sensation quand mes doigts couraient sur les touches noires et blanches, ces mélodies si belles qui me poussaient à aller plus loin, chercher plus compliqué pour faire plus impressionnant, et la façon dont tout mon être était en communion avec l’instrument. Le piano était devenu comme une extension de ma personne, et ça s’était fait très vite parce que j’avais commencé à jouer très tôt. Probablement même avant de savoir compter. Ma mère m’a transmis tout son savoir, et elle ne laissait passer aucune erreur. Quand je rentrais de l’école, je m’installais aussitôt au piano, et elle contrôlait tous mes gestes. Elle était sévère en tant que professeure mais ça ne me gênait pas parce que je gagnais le gros lot chaque fois que je la voyais sourire quand je terminais une partie compliquée – pour mon âge – d’un morceau. Les gamins de mon âge voulaient tous ressembler à leurs pères plus tard mais pas moi. Moi, je voulais être « comme Maman quand je serai grand ». Et je le répétais sans arrêt à qui voulait l’entendre, persuadé dans ma si grande candeur que ça ferait sourire comme ma mère souriait. Le jour où j’ai dit ça au vieux, j’ai compris que non. Mon grand père et ma mère ne s’entendaient pas du tout. Ce n’était un secret pour personne d’autre qu’Aisling et moi. Pour le vieux, en tant qu’héritier, je ne pouvais pas avoir de temps pour ces choses. Il trouvait qu’en plus, ça me féminisait, que j’allais finir gay et ça il ne le voulait pas. Pas qu’il soit totalement homophobe. Il tolère, tant que ce n’est pas son sang. C’est toujours plus simple quand c’est les autres. Bref, il ne voulait pas que je poursuive. Alors ma mère s’en prenait plein la gueule. Je ne le savais pas. Et j’étais trop jeune pour comprendre. La seule chose que je pouvais lui proposer, c’était d’aller jouer quand je voyais qu’elle ne souriait plus. J’étais éveillé quand j’avais cinq ans. Et attentif. Beaucoup trop attentif. C’est probablement pour ça que j’ai vite vu que quelque chose n’allait pas. Au-delà de tout ça, quelque chose n’allait pas, mais je ne savais pas quoi. J’ai compris plus tard.
Cancer.
Un jour, elle a commencé à se plaindre de douleurs. Rien de très grave, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus donner ses cours. Alors ont commencé les allers et retours entre la maison et l’hôpital. Y a un truc que je trouve horrible. Je ne sais pas s’il y a quelque chose que je déteste autant que les hôpitaux. Probablement en fait, parce que je n’aime pas grand-chose. Mais mon aversion pour les hôpitaux atteint des sommets. L’odeur est immonde, les murs trop blancs, le personnel hypocrite. La première fois que ma mère s’est retrouvée à l’hôpital, c’était à la suite d’un malaise. Elle préparait notre goûter à Aisling et moi et soudainement, elle s’est écroulée. Nos cris ont alerté mon père qui pour une fois a su se mettre de côté pour s’occuper d’elle. À l’hôpital, mauvaise nouvelle. C’était une tumeur qui grossissait au niveau du cerveau. Elle était opérable mais il fallait faire vite. Alors ma mère a été prise en charge rapidement. Moi, je savais que quelque chose n’allait pas, alors je pleurais. J’avais cinq ans, qu’est-ce que je pouvais faire d’autre ? Je voulais juste ma mère. Avec Ais, nous étions assis sur ces chaises inconfortables de salle d’attente avec ordre de mon père de ne pas bouger. Alors on a attendu. Longtemps. Tellement que je n’ai plus eu de larmes à verser. Ou peut-être que c’était le regard que m’avait lancé mon père qui m’avait obligé à me calmer. L’attente a été longue. Très longue. Alors quand nous avons vu le chirurgien arriver, nous avons tous sauté de nos chaises. Je n’ai absolument rien compris à ce qu’il racontait. Je voulais juste ma mère. Je ne savais pas que c’était le début d’un long parcours. Après la première opération, elle était méconnaissable. Il avait fallu raser sa tête pour opérer, alors elle n’avait plus de cheveux sur la tête, un horrible bandage à la place. Et surtout, ses yeux ne s’ouvraient pas. Alors évidemment, j’ai paniqué. Aisling aussi, dès qu’elle a senti ma panique. Ce n’était pas un endroit pour des enfants, avait fait remarquer le médecin. Il avait raison. Mais moi je voulais bêtement camper là jusqu’à ce que ma mère puisse rentrer avec moi. C’est arrivé quelques semaines plus tard. La tumeur était a priori bénigne, mais les médecins avaient quand même noté la présence de cellules inquiétantes alors ma mère était sous traitement. C’était un langage que je ne pouvais pas comprendre. Je trouvais juste qu’elle avait de la chance d’avoir autant de bonbons à manger pendant les repas, et j’étais un tout petit peu en colère parce qu’elle était tout le temps trop fatiguée pour jouer du piano avec moi. Mais bon, je l’aimais quand même. Et puis quand elle prenait ses bonbons, ça avait l’air de lui faire du bien. Mais ça avait l’air seulement. L’année suivante, une autre tumeur est apparue. Et cette fois, elle n’était pas bénigne. Et je savais ce que ça voulait dire dans les grandes lignes, j’avais cherché sur Internet. Elle était malade, et c’était grave. Il a d’abord fallu stabiliser son état, trouver le traitement adapté. Ça a commencé par des comprimés encore, et puis les médecins ont réalisé que ce n’était pas suffisant, alors Maman a commencé à aller de plus en plus souvent à l’hôpital. Et pendant un moment, ça a commencé à aller. Je l’ai vue se tarir sous mes yeux, elle avait perdu son énergie, ses cheveux, ses sourcils, mais la flamme qui faisait pétiller son regard commençait à revenir. C’était bon signe. Jusqu’à la rechute peu après qu’Ais et moi ayons fêté notre septième anniversaire. Cette fois ce n’était plus une mais plusieurs tumeurs à plusieurs endroits dans son corps et beaucoup trop vite à mon goût, on a parlé de stade terminal. Ma mère ne pouvait même plus bouger tant elle était faible. Elle restait à l’hôpital. Aller la voir était un combat. Mon père disait ne pas avoir le temps, le reste de sa famille n’aimait pas ma mère alors c’était inutile, et la famille de ma mère était trop loin, même si parfois ses parents venaient, parce que quand même, leur fille était mourante. Mais d’une façon ou d’une autre, Ais et moi on se débrouillait pour la voir. J’aurais aimé garder de meilleurs souvenirs tu sais ? Est-ce que c’est normal que lorsque je pense à ma mère, les seules images qui me viennent, c’est elle en train de crever sur ce lit d’hôpital ? Que je ne voie plus que sa fin, et non tout ce qu’elle a été ? C’est comme si les deux ans où elle a été malade avaient effacé tous les autres souvenirs. Surtout quand celui qui est le plus frais dans ma mémoire est celui de son dernier jour. Je me souviens que je luttais. Je luttais pour elle. Pour qu’elle garde le sourire. Pour qu’elle continue de se battre. Chaque fois, je lui faisais promettre. Je lui faisais promettre qu’elle ne m’abandonnerait pas. Aujourd’hui, je ne fais pas de promesses. Jamais. C’est du vent. Juste de l’air qu’on brasse pour faire gonfler l’espoir. Espoir qui blesse quand on le crève comme un ballon. C’est une des choses que j’ai appris avec ma mère aussi. Le jour où elle est morte, je crois qu’elle savait. Dix-neuf décembre deux mille quatre-vingt-treize. Ma mère avait décidé d’abandonner. Quand on est entré dans la chambre, elle a essayé de m’adresser un sourire. C’était plus une grimace qu’autre chose. Il n’y avait plus aucune énergie dans son regard, elle s’était complètement tarie, fanée. J’avais peur Yuki. Tellement peur. Parce que c’était comme s’il n’y avait déjà plus de vie en elle. Alors je ne sais pas pourquoi j’ai été surpris quand elle a commencé à convulser alors qu’Aisling et mon père venaient de sortir. Je parlais avec elle, sous le regard attentif d’une infirmière et tout à coup, c’était la catastrophe. Je lui avais fait promettre encore tu sais ? Mais je ne savais pas que ce serait la dernière fois. Parce que quand mon père et ma sœur sont revenus, ma mère, elle n’était déjà plus.
Franchement, je ne vais pas passer par quatre chemins pour dire que j’ai mal vécu sa mort. Très mal. J’me suis senti trahi, abandonné. Exposé. J’avais la haine du haut de mes sept piges, l’apogée d’une colère en latence que je n’exprimais pas parce que je ne savais pas ce que c’était. Je me rappelle son enterrement comme si c’était hier. Le vieux a refusé qu’elle soit enterrée dans le cimetière familial. Personne ne savait où il fallait l'enterrer, vu que le vieux avait donné son veto, mais que sa famille voulait qu'elle soit enterrée là où irait le reste de sa famille au Japon, le cimetière Ingawa donc. Tout le monde se disputait pour des broutilles. Et quand ils se sont retrouvés avec l'urne contenant ses cendres entre les mains, la question du lieu est revenue sur la table. Des détails pour moi à l’époque, et ça n’est pas bien différent aujourd’hui. Dans tout ça, ma sœur était effondrée, et à part moi, personne ne s’en préoccupait vraiment. Le soir à la maison, c’était froid, mort. Bien pour rappeler que ma mère n’était plus là. J’ai dû mettre ma rancœur de côté pour consoler ma sœur parce qu’il n’y avait plus que moi pour le faire. Le jour où on a enterré les cendres de ma mère, j’ai scruté les visages, j’ai regardé le monde, vêtu de mon costume bien noir qui me faisait passer pour une citrouille avec mes cheveux trop roux. Et je voyais bien que personne n’était sincère. Je veux dire, tout le monde pleurait, mon père y compris. Pourquoi ? Il ne l’aimait pas. Il ne voyait ma mère que comme une partenaire sexuelle. Rien d’autre. Hypocrite. Et moi ? Moi je regardais les larmes de crocodile sans être capable d’en verser une seule qui serait la plus honnête de toutes.
Je n’ai pas pleuré.
J’étais en colère et je le suis toujours. Si j’avais l’opportunité de voir ma mère, je commencerais par l’insulter dans toutes les langues que je maîtrise. Rien à foutre qu’elle soit ou non ma mère en fait, plus maintenant. Je suis sorti de mon complexe d’Œdipe depuis longtemps et il ne me reste plus que la rancœur. Et celle-là, elle ne disparaitra pas. Probablement pas. Jusqu’à présent, elle est toujours là. Sa mort m’a changé. J’avais tellement de rage en moi que je pouvais plus être ce petit garçon tout gentil, tout doux, qui se laisse marcher sur les pieds. Alors j’ai commencé à avoir quelques soucis à l’école. J’étais trop violent. Je manquais de respect. Je n’écoutais pas. C’était l’expression d’une douleur mais personne ne comprenait. Personne ne pouvait comprendre. Et laisse-moi te dire que quand tu souffres, personne ne comprend jamais. Ils disent comprendre, mais ils mentent. Personne ne comprend. Je devenais ingérable, j’en avais conscience et en un sens, ça me plaisait. Mon père essayait bien de me brider mais à force, j’étais immunisé contre ses coups. Le seul que j’écoutais un peu, c’était le vieux je crois. Et encore. C’était uniquement parce que mon père se plaignait. D’ailleurs, lui non plus n’était pas au meilleur de sa forme. Suivre mes frasques devenait difficile pour lui, disait-il. On a découvert plus tard qu’il avait des problèmes cardiaques. Il n’en avait jamais parlé. Parfois je me dis que ma mère avait peut-être raison. Elle croyait dur comme fer en ces histoires de destin et elle était certaine que le sien et celui de mon père étaient liés. J’ai jamais cru à ces histoires mais quelques mois après ma mère, c’était son mari qu’on enterrait. Crise cardiaque pendant son sommeil. Difficile à croire hein ? Et pourtant, lui aussi, du jour au lendemain, il n’était plus là. J’avais toujours cru le vieux insensible à tout tu sais ? D’ailleurs, il me répète sans cesse que c’est comme ça qu’il faut être, que si tu montres une faiblesse, c’est la mort assurée. Mais le jour où les cendres de mon père ont été mises dans l’urne, je l’ai vu perdre tous ses moyens. Moi ? J’aurais aimé pouvoir dire que sa mort était un soulagement. À mesure que je devenais plus incontrôlable, il devenait plus violent avec moi aussi. Alors j’aurais pu être soulagé. Mais je ne l’ai pas été. J’ai ressenti ce pincement au cœur, et je me suis senti très seul. Pourquoi ? Je veux dire, il n’a jamais été un père. Il ne m’a jamais aimé, et c’est très vite devenu réciproque. Alors je ne comprends pas pourquoi. Pourquoi j’ai ressenti ce manque ? J’ai posé la question autour de moi. Personne n’a su me répondre. D’un autre côté, personne n’a compris ma réaction non plus.
Je n’ai pas pleuré.
Ma sœur, elle, a versé toutes les larmes de son corps. Indésirable peut-être, mais mon père l’aimait bien au fond. J’imagine en tout cas. C’est pas comme si je pouvais vraiment vérifier. J’me dis que j’ai sûrement un truc qui fait que mon propre père n’a pas pu m’aimer. Au moins c’était réciproque. Même si ce n’était pas si simple que ça quand j’avais huit ans. Depuis j’ai appris à me détacher, mais je prenais vraiment beaucoup trop à cœur à l’époque. Je crois que c’est pour cette raison que personne n’a compris mon impassibilité. Parce que j’étais un gosse expressif, impulsif, trop plein d’émotions. Mais moi, je ne savais pas quoi choisir entre pleurer, hurler, péter un plomb ou faire tout en même temps. Alors c’était plus simple de ne rien choisir et de tout garder pour moi. Ça a commencé là je pense. Mes difficultés à parler de ce que je pense ou ressens. Ça vient de là. Ces décès m’ont introverti, et renfermé sur moi. Il n’y avait qu’Ais qui entrait, parce qu’elle était ma sœur jumelle et que la plupart du temps, elle savait ce que je pensais. La connexion. Aujourd’hui encore, je ne sais pas vraiment ce que je pense de tout ça. Enfin, un peu quand même. Je n’aurais rien à dire à mon père. Absolument rien. Ma mère en revanche, je lui vomirais mon amertume à la gueule. Je lui en ai voulu de ne pas s’être battue un peu plus, d’avoir abandonné, de m’avoir abandonné et d’être partie sans moi. Je lui en veux toujours, mais je ne sais pas si c’est pour les mêmes raisons.
Il y a une personne qui n’a jamais perdu le nord lorsqu’il s’agissait de ma sœur et moi : le vieux. Dans la famille, nous étions pointés du doigt. Après tout, nous n’étions que des orphelins, à moitié étrangers en plus. Alors le nom est entré en jeu. Et le nom a fait la différence. Il fait toujours la différence. Je n’étais pas juste Akira – personne ne m’appelait jamais « Kyle » à part ma mère, et Ais, j’avais l’air suffisamment étranger comme ça apparemment, et puis je ne permettais à personne d’autre de le faire – j’étais Akira Inagawa, et j’ai très vite compris que ce n’était pas rien. C’est comme ça que j’ai été mis au courant de l’implication de ma famille dans la pègre, chose dont ma mère voulait me protéger. J’étais un héritier, et on ne laisse pas un héritier orphelin. Alors c’est sous la tutelle du vieux que nous avons été placés ma sœur et moi. Il avait perdu un fils, mais il gagnait deux petits enfants dont un qu’il pouvait modeler à sa guise. Mais pour ma sœur et moi, ce n’était pas ça. Pas du tout. Alors on a sombré dans une espèce de mutisme, où on ne communiquait vraiment que l’un avec l’autre. On avait l’impression d’être seuls face au reste du monde, ce qui en un sens n’était pas tellement faux. On était vu comme les gosses trop chanceux, tombés dans la bonne famille et qui n’avaient qu’à lever un doigt pour avoir ce qu’ils voulaient. Je crois qu’ils projetaient sur nous ce dont ils rêvaient. Parce que c’était bien loin de se passer comme ça. Le vieux était dur. Et je ne crois pas qu’être sous sa tutelle était une chance. Oui, je suis soudainement devenu le petit roux étranger avec beaucoup d’influence, mais ça aurait été le cas, grand père ou pas. Ce n’était pas la chance, c’était le nom. J’étais devenu insupportable. Le vieux n’avait aucun intérêt à récupérer un gosse à problèmes. En revanche, laissé seul, ce gosse à problèmes pouvait lui poser des problèmes. C’est pour ça qu’il a pris notre garde à Ais et moi. Entre le rêve et la réalité, il n’y a pas de fossé. Non, c’est plutôt un ravin.
Je n’ai pas toujours détesté mon grand-père. Et même aujourd’hui, est-ce que je le déteste vraiment ? Peut-être. Je suis ingrat après tout, c’est dans ma nature. Néanmoins, la réticence est vite née. Il s’est très vite imposé, dans ma vie en particulier. Des études ont montré que jusqu’à l’âge de sept ans, la personnalité d’un enfant était très malléable. Passé cet âge, elle est presque totalement formée, et même si elle peut changer en grandissant, ce n’est rien de majeur. Donc théoriquement, j’avais déjà ma personnalité bien définie lorsque je suis passé entre les mains du vieux. Pourtant, il a réussi à me formater sans problème. Pour ça, je devrais être un peu reconnaissant quand même. Parce que si je n’avais pas changé, s’il ne m’avait pas changé, je me serais fait écraser au sein de la Famille. Je devrais, mais je ne le suis pas. Ça, c’est parce que je suis ingrat. Et parce que je lui reproche certaines choses aussi. J’ai peut-être été naïf, mais jamais je n’aurais imaginé être associé à la pègre quand j’étais petit. Aucun gosse ne rêve de devenir un criminel plus tard après tout. Moi, je voulais devenir pianiste, comme ma mère. Une sorte d’hommage. Je n’étais peut-être plus très studieux en cours, mais pour le piano, j’étais doué. Je me préparais à des concours pour intégrer de grands conservatoires où être un virtuose ne faisait pas la différence. Personne ne croyait vraiment en moi, à part une des sœurs de ma mère qui nous rendait régulièrement visite et qui était prof en conservatoire. C’était elle qui payait mes cours de piano après le décès de ma mère. Elle était certaine que j’y arriverai. Et j’y croyais, jusqu’au jour où le vieux a mis fin à tout ça. Pour lui, le piano c’était dérisoire, affaiblissant, fragilisant, et je devais être un garçon fort. Alors il a fait en sorte que tout s’arrête. Il m’a privé de mon souffle. Je n’étais pas si insensible pour rien tu sais ? Tu me le disais souvent mais je ne le faisais pas exprès. Y a juste beaucoup de choses en moi qui sont mortes. Et bien mortes d’ailleurs. J’éjecte les restes par la fumée de mes clopes. C’était malsain parce que le vieux est un as lorsqu’il s’agit de persuasion, et il a réussi à transformer mon amour pour l’instrument en aversion. Il appuyait là où ça faisait bien mal sans se préoccuper du fait que je n’étais qu’un gamin et que j’aurais sûrement des blocages pour le restant de mes jours. Imagine la réaction de ma tante quand elle a appris que son petit neveu si talentueux ne voulait plus poursuivre. Qu’un conservatoire serait une perte de temps, et qu’il ne voulait plus rien qui le rapproche de sa mère parce que celle-ci avait choisi de l’abandonner. Qu’est-ce qu’on est manipulable quand on est gosse. Très vite, les choses ont commencé à changer, et avant que je ne m’en rende compte, je devenais une toute autre personne. La métamorphose dans mon comportement n’était pas si visible quand j’avais dix ou onze ans. Mais après en revanche… J’avais parfaitement conscience de ce que j’étais devenu en grandissant. Daredevil. Toujours aussi impulsif, mais bien moins émotif. Un peu trop rebelle au goût du vieux. Il voulait un deuxième Tatsuya, mais à la place, c’est celui que je suis qu’il a formé. Et il a vite déchanté. Parce que moi, j’avais du mal avec les règles. Très vite, quand il disait blanc, moi je disais noir. Je faisais à peu près tout ce que je voulais. Parce que je savais que je pouvais. Et ça ne plaisait pas toujours à mon grand-père, mais c’était un peu sa faute, c’est lui qui m’avait rendu ainsi. Alors j’en profitais. L’année de mes quinze ans a été l’année charnière je pense. Avant, j’étais encore un peu entre le puéril et le plus mâture. Après, le puéril a été éjecté. Et je suis entré dans le cycle des premières fois. A quinze ans, je n’étais plus le petit nippon roux que tout le monde pouvait écraser. Comme ma mère, je développais cet air un peu exotique qui faisait qu’on m’approchait pour sociabiliser et non plus pour me harceler. J’ai compris très tôt que lorsqu’on suscite l’intérêt, avec un sourire et les bons mots, on pouvait avoir ce qu’on voulait. Alors j’avais facilement ce que je voulais. Et c’était bon tu sais ? Je n’avais rien à faire. Un exercice pas terminé ? Il y avait quelqu’un. Une clope parce que le vieux avait confisqué mes paquets ? Encore quelqu’un. Besoin de me défouler ? Toujours quelqu’un. Et le mieux ? C’était les filles je crois. Avec elles, pas le moindre effort à fournir si ce n’était sourire. Bien sûr derrière, le vieux guettait. Il tenait à garder son contrôle sur moi. Le truc c’est qu’il l’avait perdu depuis longtemps. Alors ouais, il voulais m’éduquer. Il me faisait avaler ses règles, ses valeurs et celles de la pègre. Je ne retenais que ce qui m’intéressais. Alors il a dû se rendre à l’évidence : j’étais mon propre maître et il avait perdu le contrôle. Alors il m’a confié à quelqu’un d’autre dès qu’il en a eu l’occasion, et dès qu’il a jugé quelqu’un de capable pour la lourde tâche qu’était mon tutorat. C’est comme ça que je me suis retrouvé avec ce type collé au cul.
Alekseï.
J’ai été introduit assez tôt au sein de la Famille. C’était logique, j’avais grandi dedans dès la mort de mes parents, je connaissais les règles par cœur même si je voulais pas y obéir. D’ailleurs je ne voulais pas être introduit non plus. Franchement, c’était pas mon but dans la vue de devenir criminel. Mais le vieux ne m’a pas laissé le choix. Pas du tout. Un jour il m’a ordonné de me lever, le soir, j’avais mon premier tatouage et me voilà yakuza. Bon, j'avoue ça n'a pas été aussi simple que ça, et ce n’était pas tellement inattendu, parce qu'on en avait discuté et que j'avais fait la sourde oreille. Je pense que le vieux attendait juste que je sois un peu plus âgé. J’aurais aimé y échapper, mais le nom ne me laissait pas d’autre choix. Alors ça s’est fait plutôt que je ne l’imaginais. Le problème ? J’étais encore jeune. Encore dans cette phase d’enfant rebelle qui voulait son indépendance. Alors quand j’ai appris que le vieux voulait que j’aie un mentor, j’ai vu rouge. Pas uniquement parce qu’il le voulait d’ailleurs. C’était aussi parce qu’il l’avait décidé et qu’il avait choisi la personne qui aurait cette charge sans rien me dire. Je déteste ne pas avoir le choix, et il le savait très bien. Alors quand il m’a parlé d’Alekseï comme étant une personne de confiance qui avait déjà bien fait ses preuves, je me suis fais une idée très claire sur lui. Probablement un grand-père ridé comme le mien, coincé du cul, qui voudrait m’apprendre les règles comme si je ne les connaissais pas. J’ai été surpris lorsqu’il m’a été présenté. Parce que ce n’était pas un vieux déjà. Et parce que quelque chose me disait que ça allait être moins pire que j’imaginais. Alors j’ai souri mon habituel sourire en coin. Celui que le vieux déteste tant parce qu’il sait que ça veut dire que j’ai quelque chose en tête. Je me souviens parfaitement de la tête de mon grand-père. Il avait l’air si satisfait de m’avoir enfin acculé qu’il n’a pas compris pourquoi moi je l’étais aussi. Bien sûr, sur le coup, ça m’a clairement ennuyé. Quand j’ai commencé à accomplir de petites tâches pour la Famille, les gens parlaient, parce qu’il y a toujours des gens pour ouvrir leur gueule. Je passais pour le mec qui avait tout posé sur un plateau d’argent, parce qu’il portait le nom. Alors j’ai ma fierté, tu le sais bien. Ouais, je voulais pas du clan, mais j’allais pas laisser une bande d’imbéciles rabaisser mon travail. Et pour moi, Alekseï comme mentor, c’était carrément l’opposé de ça. J’étais juste le p’tit protégé par un type qui devenait intouchable et j’aimais pas. Mais très vite, j’ai revu mes calculs. Parce qu’au fond, qui pouvait m’emmerder ? Personne. Et ce pouvoir là, entre mes mains, c’était jouissif. Et puis en tant que personne, Alekseï ne m’était pas antipathique. Au-delà de mentor pour le clan, il a aussi été un peu prof quand j’ai décidé de redevenir sérieux en cours. Et puis il me couvait un peu, j’avais l’impression d’avoir un grand frère plus qu’autre chose. Je l’ai apprécié un peu plus quand j’ai réalisé qu’il encourageait ma rébellion. Si dans un monde alternatif, mes relations avec le vieux devaient s’améliorer, ce ne serait certainement pas grâce à lui. Mais je l’aime bien. C’est le principal. Peut-être que j’aimais pas ce que je faisais, mais au moins les choses marchaient bien. Jusqu’à ce que je sorte du placard comme on dit. Je n’y avais jamais vraiment été caché en fait, mais puisqu’on a tendance à mettre des labels pour tout. C’est Aisling qui a su en premier. Je me fichais bien de l’avis des autres, mais le sien comptait. J’avais dix-huit ans, fraîchement entré à Tōdai. Avec ma sœur, on partageait ensemble cet appartement, et elle avait l’habitude de me voir aller et venir avec des gens différents chaque jour. Je profitais, j’étais plus sous le contrôle constant du vieux, et même s’il y avait toujours Alekseï qui tenait le rôle qu’on lui avait attribué, ça n’était jamais aussi insupportable qu’avec mon grand-père. Alors un jour, Ais a été surprise. Je lui avais sorti la même excuse, expliquant que j’allais bosser mes cours avec un binôme le soir. Elle a toujours su ce que ça voulait dire. Mais elle ne s’attendait pas à ce que je rentre avec un mec. Il me semble qu’elle a lâché un cri d’abord, et puis quand elle m’a vu parfaitement calme, elle m’a lancé ce regard, celui qui disait que j’aurais beaucoup à expliquer. Je lui ai adressé un clin d’œil et je suis parti. Pour elle, c’était bon, les autres pouvaient aller se faire foutre.
Je suis resté quelques temps avec ce type mais pas suffisamment pour me rappeler pleinement de lui alors je vais l’appeler Jag. Quand le vieux a découvert pour Jag, ça a été un pré Shukumei. Il est devenu livide. Persuadé que c’était la faute de ma mère si j’étais devenu une pédale. Il m’a hurlé qu’en tant que son petit fils de sang, je pouvais pas être comme ça. Qu’il ne l’acceptait pas et qu’il voulait que je redevienne comme avant. Mais « comme avant », qu’est-ce que c’était ? Parce que pour moi, il y avait eu beaucoup d’avant. Alors j’ai posé la question. Et je crois que même mon père ne m’a jamais giflé comme l’a fait le vieux en guise de réponse. Ça a été le déclencheur. J’ai réalisé à ce moment-là que j’intériorisais vraiment beaucoup de choses. Et tout a fini par sortir à ce moment-là. La vérité, c’est que son avis m'importait peu. Il était venu me confronter, comme s’il avait le pouvoir de faire quoi que ce soit, oubliant que son influence sur moi n’était plus. En fait, c’était surtout l’occasion de lui balancer au visage tout ce que je lui reprochais. Et maintenant ? Je fais toujours ce que je veux de mes fesses. En revanche, ma relation avec le vieux ? Elle doit bien être six pieds sous terre elle aussi.
Ça commence à faire un moment que je parle dans le vide et je n’ai aucune idée de pourquoi je continue. Mais Ais avait raison, ça fait du bien au fond. Tu sais qu’elle voulait que je voie un psy ? Moi, Akira Inagawa, chez un psy ? Franchement, j’ai ri. Je n’ai jamais eu besoin de parler à quelqu’un, et ça n’arrivera jamais. Je veux dire, oui, j’ai un bagage. Mais le porter seul ça me muscle. Et toi, Yukino, t’as un poids énorme dans ce bagage. Avec Jag, ça n’a pas duré. Je me suis lassé, comme toujours. Et puis je devais quitter le pays pour les études. Direction les Etats-Unis. Bien sûr que j’allais m'amuser, et avec une attache, ce n’était pas possible. Alors bye Jag. Mais tu sais, j’ai jamais cru au coup de cœur, jamais vu la vie en rose. Mon monde à moi était gris et sale. Peut-être que quand j’étais gosse, il y avait plus de couleurs. Je n’étais pas si apathique. Ce voyage, c’était l’occasion de prendre de la distance pour quelques temps. J’avais dix-huit ans, j’étais étudiant, je voulais me préoccuper d’autres choses que des tâches qui m’avaient été confiées au sein du clan. Alors je suis parti. Et toi aussi. Tu faisais partie des étudiants qui partaient aussi, même si ce n’était pas exactement dans le même cadre. Je ne t’avais jamais remarquée avant, alors que tu avais toujours été là. Tu me connaissais déjà, pas moi. Je pensais que ça serait comme d’habitude. J’avais beaucoup de noms pour qualifier mon comportement. Don Juan, beau parleur, et puis plus vulgaire aussi, mais je sais pas, je suis entouré de morts alors je vais éviter les injures. Je ne pouvais pas me sentir offensé, puisque tout ça, c’était la vérité. Ça me glissait dessus comme du beurre au soleil. Je me savais volage, et ça me plaisait assez, parce que les attaches pour moi, ça rime avec problèmes. Et là-dessus, je ne me suis pas trompé. Le fait que tu bouffes les pissenlits par la racine – où que tu les nourrisses en bon terreau, j’en sais rien – en est bien la preuve. Tout a commencé dans cette boîte où on avait décidé d’aller avec les mecs du groupe. Je ne sais pas lequel d’entre eux à penser que ce serait cool de faire une soirée a Japanese in New York, mais finalement, on s’est tous retrouvé dans un club. L’ambiance, l’alcool, les drogues variées, être là alors qu’aucun d’entre nous n’était majeur selon les règles du pays, c’était bon. Tout le monde a profité. J’ai bien profité, toi et moi, on a profité. J’avais tellement d’alcool dans le sang que j’étais encore out lorsqu’il a fallu retourner en cours le lendemain. Mais toi non. Toi, t’étais parfaitement consciente de ce que tu faisais. T’avais un objectif, et c’était moi. Je me souviens qu’on s’est tourné autour un moment. Que ça me plaisait de jouer au chat et à la souris avec cette fille sortie de nulle part que je rencontrais pour la première fois en boîte. On a joué un moment avant de sauter le pas. Pour moi, l’objectif était rempli. J’avais utilisé mon mouchoir, et il était temps d’en prendre un autre. Tu savais que je ne me posais pas. Tu savais que je ne cherchais pas l’exclusivité. Je ne pouvais offrir que de l’éphémère. Tu le savais. Tu le savais, et pourtant, tu as commencé à me harceler. Appels sur appels, messages en cascade, et même les mails ! Tu n’arrêtais pas. Tu ne te démontais pas, même quand je prenais plaisir à te rabaisser, à t’humilier pour que tu me colles enfin la paix. Une grande malade, voilà ce que tu étais. J’avais même mis Aisling sur ton cas, pour qu’elle te pousse à me lâcher, mais rien n’y faisait. Tu me faisais chier. Je voulais vraiment me débarrasser de toi, sans réaliser qu’en fait, tu commençais à t’imposer à moi. Je ne sais pas comment tu t’y es prise. Mais au bout d’un moment, je n’ai plus eu envie de t’humilier. J’ai accepté de te revoir en privé, plus d’une fois, ce que je ne fais jamais. Te témoigner de l’affection en public. Très vite, j’ai tout accepté. Et puis j’ai réalisé que quelque chose avait changé. J’avais changé. Tu as réussi à me rendre pathétiquement sentimental pendant une certaine période de ma vie. Un autre exploit : tu as réussi à me remettre au piano. Tu as ignoré ma haine inexpliquée pour l’instrument, et tu m’as obligé à jouer. Et même si mes doigts ont longtemps hésité sur les touches, même si mes mains tremblaient, même si j’ai plus abattu mes poings sur le clavier que je n'ai joué, tu as patienté. Tu savais que c’était mort et enterré pour moi, mais tu as attendu. Tu as cru. Et je crois que c’était ça le plus fort : tu croyais en moi. C’était bien stupide de ta part, mais mon moi à dix-huit, dix-neuf puis vingt ans aimait ça. Il aimait parce qu’il pouvait se croire encore un peu libre de rêver. Surtout quand tu lui as un jour dit que tu l’aimais. Sur le coup, il ne t’a pas cru. Il s’est méfié. Pour lui, c’était inhabituel, pas naturel. Mais il a fini par accepter, parce que bon, il t’aimait lui aussi. Qu’il était stupide. Il s’est laissé croire que tu allais durer. Que toi et lui, c’était à jamais. Qu’est-ce que j’étais stupide encore à vingt ans. Ça n’a pas duré. Rien ne dure jamais, et j’ai dû le comprendre malgré moi. Du jour au lendemain, tu avais disparu. Pas un mot, ni aucun contact. Tu n’étais juste plus là. Je crois qu’à partir de là, j’ai commencé à te détester. Parce que ça m’avait fait mal, plus que je ne pouvais l’imaginer. Après tout, je t’aimais.
Heureusement pour moi, j’ai vite réalisé la bêtise qu’étaient les sentiments. Je suis pas resté longtemps dans le bain du pathétisme. En fait, assez vite, ça m’a énervé de ne penser qu’à toi, à ton départ et à ton manque évident de communication. Ça m’a énervé au point que tout était source d’irritation. Alors j’ai écourté mon séjour et je suis revenu aux sources. Bien sûr que le sale et l’ignoble me feraient me sentir mieux. J’étais prêt à faire n’importe quoi pour le compte du vieux, tant que j’avais un truc à faire. Je suis devenu exécrable. Les tenanciers de bars commençaient à me connaître. Non, je n’ai pas sombré dans l’alcool comme un foutu fragile. J’y allais parce que c’était les meilleurs terrains de chasse que je pouvais avoir. Finalement, la seule chose qui a témoigné de ce que j’avais vraiment été blessé, c’est que je n’ai eu aucune conquête féminine pendant un moment. Je voulais un abruti qui allait prendre soin de moi et mon fessier pendant une nuit avant de passer au suivant. J’avais retrouvé ma routine, et tout allait pour le mieux, sauf que, un jour comme ça, tu t’es pointée chez moi, sortie de nulle part, comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes. Pas un « désolée », rien. T’as osé m’appeler Kyle et passer plus de cinq secondes sur le seuil de ma porte. Alors je t’ai aboyé de dégager. Je ne voulais plus rien avoir à faire avec toi. T’étais franchement la dernière des personnes sur la planète avec qui je voulais partager mon oxygène, et c’était beaucoup dire sur à quel point j’avais appris à te haïr. Tu es partie, pour revenir peu de temps après, les bras chargés d’un bébé qui ne ressemblait à rien – soyons honnêtes, qu’y a-t-il de beau à un gosse qui vient de naître ? – et tu me l’as donnée, expliquant qu’elle s’appelait Tora et que c’était la mienne. Ah. Surprise, surprise ! J’ai commencé à hurler, donc la gamine s’est mise à pleurer, et toi, tu as dû nous calmer tous les deux. La petite, c’est allé vite. Moi, il a fallu un peu plus de persuasion. Mais j’ai fini par céder. Je te cédais toujours. Je ne savais pas que cette fois en revanche, ça allait te tuer. Le baiser de la mort n’aura jamais été aussi littéral.
Pendant la nuit, j’ai dû appeler ma sœur. Il me fallait de l’aide où j’allais faire voler Tora à travers l’appartement pour tester son aérodynamisme. Aisling était en pleine soirée, mais elle est revenue m’aider malgré tout. Vers trois ou quatre du matin, la gamine s’était remise à hurler. Bien évidemment, je hurlais en retour, mais ça ne semblait pas être d’une grande efficacité. Si ma sœur ne faisait pas vite, j’allais vraiment déconner avec cette chose à la gueule rougie qui pissait dans ma chemise en guise de couche. Alors l’appel a été plutôt tendu. Je ne me suis relaxé que lorsque j’ai eu la certitude que ma sœur se mettait en route. J’ai abandonné mon portable dans un coin, et je me suis assis sur la table basse avec un soupir. Tora s’était soudainement calmée, et depuis le canapé où elle était installée, elle me regardait en gazouillant, ses bras et ses petites mains potelées agités de tous les côtés. Et pendant que je la regardais comme ça, je crois qu’il y a eu connexion. Elle avait peut-être une belle imbécile pour mère, mais cette gamine – ma fille – méritait que je l’aime.
Tu sais Yuki, les nouvelles de ton décès sont allées très vite. Est-ce que c'était parce que j'avais des contacts partout ? Parce que notre relation, même à l'étranger, n'avait eu, d'une manière ou d'une autre, aucun secret pour personne ? C'est vrai, à mon retour, tout le monde savait déjà. Sûrement Aisling. Mais en tous les cas, de la même façon que tout le monde a su pour toi et moi, et pour Tora, tout le monde a su aussi pour ta mort. Tous avant moi. C'était le genre de moment où tu sais qu'il y a un truc qui se trame mais tu ne sais pas exactement quoi. Tu sens cette espèce de tension malsaine, porteuse de mystères et de malheurs, mais tu n'as pas la moindre idée de ce qui se cache. Ce jour-là, j'avais emmené Tora chez le doc avant de rentrer. J'étais crevé, journée de travail chargée. Enfin, travail… Tu vois bien de quoi je parle. Et Ais m'attendais à la maison. A sa tête j'ai tout de suite compris que quelque chose n'allait pas. Elle m'a lancé un de ses regards que je ne supportais plus. Celui qui voulait dire « Désolée, j'ai mal pour toi » comme à l'époque où j'étais victime de harcèlement à l'école quand on était gosse à cause de ma démarcation physique – c'est fou ce que les gens peuvent être méchants quand ils sont incapables de définir ce que tu es. La phobie de la différence. Et ce regard, j'avais appris à ne plus le supporter. Alors elle m'a laissé aller coucher la petite. Et elle m'a ensuite fait asseoir pour qu'on discute. Je ne le sentais pas tu sais Yuki ? Pas du tout. Dès qu'elle a commencé à parler, j'ai senti mon estomac se resserrer. Est-ce que tu peux imaginer comment j'me suis senti ? Comment j'me sens encore ? Est-ce que tu t'es même posé cette question Yuki ? Savoir ce que je ressentirais, comment j'le vivrais ? Aujourd'hui encore j'me demande comment tu as pu être si conne ! Si égoïste envers ta fille, envers moi. J'ai eu mal comme je n'avais jamais eu mal Yukino. Ma sœur a attendu que je m'apaise pour tout me dire. La raison de ton départ, les motifs de ton choix. Elle m'a dit que tu es allée la voir après m'avoir vu. Que tu as pris le temps de tout lui expliquer parce que tu savais que tu t'étais condamnée. Et que les miliciens sont venus te prendre alors que tu lui parlais encore. Que tu ne t'es même pas débattue, que c'était inutile. Pas une larme, juste un sourire. Elle n'a pas compris pourquoi. Elle m'a simplement dit que tu n'étais pas triste. Que tu avais tenté de ne pas penser à cette solution. Mais qu'après la naissance de Tora, ce n'était plus possible. Alors tu as pris ta décision.
Pour ça Yuki, je t'ai détestée. Mais plus que toi, c'est le système que j'ai haï. Quand Ais a terminé de tout me dire, je suis sorti. Je voulais être tranquille. Seul. Cette nuit-là, j'ai dû faire toutes les conneries du monde. Pour faire passer ma rage, ma colère, et puis très vite, ma tristesse. J'ai passé le reste de la nuit au piano lorsque j'ai décidé de rentrer. Parce que tu aimais ça, parce que peut-être, naïvement, bêtement je croyais que tout ça n'était qu'un rêve, que faire ce que tu aimais m'en ferait sortir. Mon cœur criait, hurlait. Mes pensées étaient assaillies par le poids de la réalisation. Et je me suis demandé, et si je n'avais pas été là ? N'étais-je pas finalement le fautif, le coupable ? Indirectement, le meurtrier ? Tout était ma faute. Je le savais et c'était insupportable. Ça me rendait dingue. Le foutu sentimental était de retour. Mais là encore…
Je n’ai pas pleuré.
Puis est venu le jour où on t'a enterrée, de façon symbolique. Evidemment, je suis venu. J'ai assisté à la cérémonie, avec Aisling, avec Tora, ta famille, ceux qui tenaient à toi autant que moi. Tous ont parlé de toi, on fait leurs discours et éloges. Et moi ? Je n'ai rien dit, rien fait. Je sentais les yeux sur moi, j'entendais les murmures, j'avais l'impression que tous savaient ce que j'avais ignoré tant de temps. « C'est lui le fils Inagawa non ? C'est à cause de lui ? C'est lui le coupable ? Qu'est-ce qui peut sortir de bon des yakuzas de toute façon ? ». Je n'ai jamais su si j'imaginais ces paroles, où s'ils les disaient vraiment. Mais à cause de ça, j'étais bien plus incapable de dire quoi que ce soit. J'ai simplement passé le micro, et je me suis tu. Bien sûr que j'étais coupable. A-t-on déjà vu un assassin venir enterrer sa victime ? J'étais pourtant certain de ne pas avoir emmené avec moi le boulet du bourreau. Amère réalité que la mort d'un être cher. Une seconde fois...
Que le meilleur gagne.
Arène privée, le grand empereur ordinateur observe à travers ses circuits grillés ces deux combattants qui font leur entrée. À l’intérieur, Dawn. Dawn Kyliann Boyle. Elle a vingt-et-un ans, pianiste virtuose qui a du succès. Intelligente et bête à la fois, trop naïve sans doute, aveuglée par un pays dont la beauté n’existe pas. Elle finit par quitter sa belle Irlande pour un Japon apparemment plus beau dont elle est tombée amoureuse. Je cherche la beauté. C’est peut-être tout le maquillage par-dessus la dictature, mais alors elle serait tombée amoureuse d’une beauté superficielle. Elle ne veut pas chercher Dawn. Elle croit que la puce est la solution. Elle veut la paire parfaite. Folie oui, on lui a dit. Mais elle n’a pas changé d’avis. Elle est la gaijin bien aimable, charmante, charmeuse. Elle a ce regard franc et pétillant, rempli de défi, rempli de vie. Cette chevelure rousse qui fait qu’on la voit partout où elle passe. Elle captive, elle attire. Charmante, charmeuse. Charmée. Elle est sensuelle Dawn, envoûtante, enjôleuse. Elle a ce quelque chose qui fait qu’elle passe pour exotique plutôt que pour étrangère. Ça fait plus beau. Ça la rend plus belle. C’est ça qui l’attire lui.
Deuxième combattant dans l’arène.
Lui, il est avant tout eux. On ne le connaît pas lui d’abord. Plutôt son géniteur. Le chef. Inagawa. Ceux-là. Lui, il est de ceux-là, il est ceux-là. Il est l’honneur, le respect. De la famille mais pas des règles. Rebelle. Ça me fait chier de le dire, mais ce trait de caractère me vient probablement de là. Lui, il est sauvage. Lui, il est indomptable. Animal sauvage qui n’a jamais connu de cage. Tatsuya Inagawa. Il est le premier, l’aîné. Il est jeune, il a la vie devant lui, l’influence de son nom entre les mains. Il l’aime cette influence. Elle lui donne l’impression d’avoir du pouvoir et il aime ça. Il ne se conforme pas, il fait ce qu’il lui plaît et il le fait quand il veut. Il ne se soumet qu’aux ordres de ses supérieurs dans la famille. Avocat, il connaît le droit sur le bout des doigts. Personne ne peut le tenir hormis l’ordinateur. Il n’a pas encore la trentaine, il est vif et il place ses pions intelligemment pour se faire une place au sein de la famille. C’est un électron libre. Il s’accroche quelque part mais change très vite d’atome. Le dernier en date s’appelait Dawn. Leur rencontre était peut-être écrite quelque part. Elle était peut-être inévitable. C’est ce que ma mère croyait en tout cas. Pour moi, ça n’était que des bêtises, mais je me suis contenté de le penser. Si elle charme, lui n’est pas en reste non plus. Il profite de sa jeunesse, chérit sa liberté.
Et puis il finit par la rencontrer.
Elle n’est pas contaminée par le virus des écrans, pour elle, c’est encore normal de sortir et de voir du monde. C’est encore normal de traîner dans les bars, pour se rappeler les pubs irlandais. Lui, il a passé sa journée devant un écran. Il veut se changer les idées. Il fait ça souvent. Il faut bien qu’il sorte pour rencontrer des gens. Alors il sort. Et ce soir-là, ils se trouvent. Il est une proie pour elle, elle est une cible pour lui. Il s’approche plein d’assurance, elle le regarde avec curiosité. Ils se jaugent un instant, avant qu’elle ne l’invite à s’asseoir. Et tout commence par un verre. Ils discutent, font vaguement connaissance. Ils se ressemblent au fond. Ils font une bonne paire. Des rires, des mains qui se touchent plus longtemps qu’elles ne le devraient, des verres qui se succèdent et des contacts plus appuyés. L’intérêt envers l’autre est partagé et ils sont bien décidés à l’explorer. Ils sont jeunes, ils veulent s’amuser. Ils font une bonne paire oui. Ils n’envisageaient pas que ce serait pour plus d’une nuit.
I’m only human after all
Don’t put the blame on me.
Don’t put the blame on me.
L’enveloppe rose. Elle est ravie, il est détruit. L’animal a soudainement été mis en cage. Il ne sait pas que c’est elle, ni elle que c’est lui. Ils se sont connus le temps d’une nuit alcoolisée, les souvenirs sont vagues, les noms depuis longtemps oubliés. Ce n’était pas important pour ce qu’ils avaient à faire. Alors la surprise est grande lorsqu’ils se retrouvent, non pas chez eux mais derrière les barreaux du centre de redressement. Lorsqu’ils se redécouvrent, lorsqu’ils se reconnaissent. Lorsqu’ils réalisent qu’ils pourront se supporter mais probablement pas s’aimer. Il est en colère. Il a l’impression qu’on lui a soudainement coupé les ailes. Comme toujours, il se rebelle. Pourquoi lui ? Pourquoi pas un autre ? Et elle, si heureuse, commence à déchanter. Ses rêves et illusions sont brisés. Elle se rend compte que le mariage ne sera peut-être pas l’idylle. Tatsuya – mon père – nous disait souvent à Ais et moi que ce jour avait été le pire de son existence. Je veux bien le croire. Ce sera le pire de la mienne aussi. Et ça me dégoûte un peu. De lui ressembler autant. Le grand-père le répète sans arrêt. Mais pour en revenir à mes parents, l’union n’est pas parfaite. Ils sortent à la limite de la dernière semaine, avant qu’il ne soit trop tard. Une routine s’installe ensuite. Ils ne s’aiment pas, mais ne se détestent pas non plus. Ils ont des accords non dits. Cordialité. Ils se supportent. Tous les jours ne sont pas roses, mais ça va. Au moins, ils ont un bon terrain d’entente : la chambre. Là-dessus, pas de doute sur leur bonne compatibilité. Ça ne suffit pas à ma mère, beaucoup trop romantique, mais c’est déjà ça. Leur entente a duré quelques temps. Jusqu’à. Jusqu’à.
Vous devrez avoir un enfant.
Pour lui, c’est trop. La consigne est claire. Trop. Elle l’a rendu fou. Il veut résister. Il refuse de se plier à une volonté qui n’est pas la sienne. Alors il commence à tarder dans les rapports. Une fois, il rate la deadline. Ils passent à nouveau par la case prison. Il s’en fout, il résiste. Même si pour ça, il doit coucher avec sa femme sous le regard attentif de miliciens. Mais la fin du délai donné pour la conception de l’enfant approche. Quelqu’un doit intervenir. Et ce quelqu’un, ce sera son père à lui. Il ordonne, en tant que chef, pas en tant que père. Il ne laissera pas son fils se tuer bêtement, certainement pas. Tatsuya obéit. Il n’a plus le choix. Alors le treize novembre deux mille quatre-vingt-six, Aisling Akane Inagawa et moi, Kyle Akira Inagawa voyons le jour, après avoir été conçus des mois plus tôt lors d’un dernier passage en prison. Là, les choses sont devenues un peu plus compliquées. Et tu sais quoi ? C’était de notre faute à ma sœur et moi.
Don’t put the blame on me.
Le problème tu vois, au-delà de la grossesse ordonnée, c’est le fait qu’il n’y ait pas eu un seul mais deux enfants. Ma mère était ravie elle, mais mon père pas vraiment. Un seul, peut-être aurait-il pu gérer. Mais deux ? Et il ne comprenait pas que ça ne dérange pas ma mère. Alors ça a engendré des disputes. La bonne entente au lit ne suffisait plus à arrondir les bords d’un mariage bien trop bancal dès le départ. Et si au début, ni ma sœur ni moi ne pouvions saisir l’étendue et la profondeur du problème, la compréhension du fait que nous étions le problème est venue très vite. Beaucoup trop vite. L’ancien n’appréciait pas spécialement ma mère. Il aurait aimé une fille du pays pour son fils. À ses yeux, Dawn était une vulgaire étrangère et non une jeune femme exotique, comme tendait à le penser la majorité des gens qui la côtoyait. Elle n’avait pas la culture, ni du pays, et encore moins du clan Inagawa, le noyau et pas l’ensemble de la famille. Elle ne se faisait pas aux règles, aux traditions et le grand-père n’aimait pas ça. Dès le départ, les relations avec le reste de la famille étaient compliquées. Mais s’il ne voulait pas de ma mère, il n’avait rien contre ma sœur et moi, ses petits enfants, contrairement à mon père qui ne voulait de nous pour rien au monde. Alors je crois que c’est assez naturellement que j’ai développé un complexe d’Œdipe. Mon père n’aimait pas ma mère, alors qui pouvait l’aimer mieux que moi ? J’ai été la victime de service dès que j’ai commencé à aller à l’école. Bousculades, moqueries, cheveux tirés. Et ma réaction ? Je pleurais bien sûr. Je finissais toujours dans les jupes de ma mère, pour qu’elle me réconforte, pour qu’elle m’aime. Et moi, je l’aimais autant voire plus en retour. J’étais le p’tit chéri de sa maman, qui venait pleurer dans ses jupes dès que ça n’allait pas. Alors au fond, j’avais un intérêt à être embêté tous les jours. Ma mère ne pouvait pas faire autrement que s’intéresser à moi. Dès lors, mon père m’avait jugé comme étant faible. Le mec qui plus tard ne serait « qu’une foutue pédale sans la moindre virilité ». Ses prédictions n’étaient pas totalement fausses. Pas totalement. Mais il est vrai que je n’avais pas une once de force à l’époque. D’ailleurs, je n’avais absolument rien pour moi. Contrairement à ma sœur qui avait hérité du regard émeraude de ma mère, moi… C’était compliqué. Je n’ai pas eu la peau laiteuse, ni la chevelure de jais. Moi, je tapais plus dans le poil de carotte, Mérida. Roux quoi. Le visage parsemé de taches de rousseur. Bref, la totale. Les gens ont toujours eu du mal à croire en ma gémellité avec Aisling. Et ça n’avait rien d’étonnant. On a les mêmes yeux, et quelques traits en commun. C’est tout. Donc tu vois, moi je me pointe tout bien habillé à l’école – dès mes trois ans d’ailleurs, je ne remercierai jamais assez ma mère – et d’office, je me retrouve à l’écart à cause de mon apparente rousseur, mon apparence qui me donne un genre indéfini – ça m'a rendu audacieux, je peux te l'assurer, les débuts de l'exhibitionisme –, et qui montre clairement que je ne suis pas à cent pour cent du pays. Je fais tâche. Et non seulement je suis une tâche à l’école, mais je suis aussi une erreur à la maison. Combien de fois n’ai-je pas entendu ces mots ? Et combien de fois n’ai-je pas pleuré pour tous ces mots ?
I’m only human after all.
Quand à seulement trois ans, tu as déjà conscience d’être le vilain petit canard parce qu’on te le dit chaque jour, quand à seulement trois ans, tu as déjà conscience d’être un indésirable, que t’as jamais été voulu, quand tu sens sur toi le regard plein de dégoût d’une des seules personnes que tu veux impressionner, que son regard seul te tatoue la peau de mots. Boulet. Raté. Indésirable. Idiot. Imbécile. Faible. Bon à rien. Pédale. Ça, dès le plus jeune âge, je t’assure que ce n’est pas agréable. C’était mon quotidien. Les moqueries des gosses de mon âge passaient encore, j’avais ma douce et aimante mère pour me réconforter et me faire sentir comme si j’étais le roi du monde. Le plus dur, c’était vraiment mon père. Que je lui ressemble comme a l’air de le croire le vieux ou pas aujourd’hui ne change rien au fait que j’aie appris à le détester dès le départ. Et ce n’est pas que je le voulais. Au contraire. Pendant un moment, il a été mon modèle. Pas parce qu’il était exceptionnel non, mais juste parce qu’il était mon père. Je voulais qu’il me remarque, qu’il me considère. Qu’il reconnaisse mon existence. Je faisais tout – et j’ai toujours cette habitude – pour être le meilleur. Je donnais toujours mon maximum, pour espérer l’impressionner. Juste un peu. Un tout petit peu. Mais un père comme le mien t’oblige à te contenter de rien. Naïvement, bêtement même, je croyais qu’il m’aimerait. C’est ce que l’être humain recherche partout non, quand il veut que l’autre l’accepte ? L’amour. Foutue connerie. Mais je le cherchais chez mon père. Je voulais être aimé autant que moi j’étais capable d’aimer. Parce que je l’aimais tu sais ? C’était filial peut-être, mais un amour qui n’est pas réciproque, je connais. Alors j’ai forcé. Longtemps. Je ne voulais pas accepter le rejet. Le rejet. C’est un horrible sentiment tu sais ? J’ai l’impression qu’il me suit, me colle à la peau et ne me lâchera jamais. Je le refusais mais le rejet a fini s’installer en moi. Lorsque pour la première fois, Tatsuya Inagawa a levé la main sur moi. C’était pour une broutille, une bêtise sans importance. Mais il ne m’a pas raté. Ni les fois suivantes. Jamais en fait. Je crois qu’il en tirait un certain plaisir. Si je pouvais lui rendre, crois-moi, je n’hésiterai pas. Ma mère a essayé de me préserver. Un peu. Du rejet, des « corrections », comme le disait si bien mon père, quand elle l’a découvert. Découvert oui. Jouer un rôle, pour moi, ça a commencé là. Avec autant d’années d’expérience, c’est facile de nager dans la fausseté et d’avoir l’air vrai. Je ne voulais pas que ma mère sache, parce que lorsqu’elle voyait des bleus sur ma peau, elle n’était plus heureuse. Et pour mon moi de l’époque, ce n’était pas concevable puisque je devais la rendre heureuse. Alors je cachais. Je jouais la comédie. À trois, quatre piges seulement ? Oui. Certaines circonstances obligent à comprendre les choses tôt. Souvent beaucoup trop. Pour mon père, c’était l’éducation à la Inagawa. J’avais encore l’âge de pleurer pour rien et de chier dans ma couche – pas littéralement hein, je n’en portais plus, quand même – mais pour lui, fallait que je sois fort. Sinon, j’étais encore plus inutile. Aisling y a échappé à ce traitement. Un peu. Un peu, parce qu’il l’aimait un peu. Mais tu sais, même ça, au fond, tant que j’avais ma mère, ça allait. Tant qu’elle était là.
Ashes to ashes
Dust to dust.
Dust to dust.
Ma mère. Elle m’a couvé. Autant que possible. Elle était toujours là. Mais rien ne dure jamais. Rien ne dure vraiment. Quand j’avais cinq ans, et que je commençais à me faire bouffer de tous les côtés, elle était là. Elle était là pour m’aimer. Je courais toujours vers elle. Toujours. Je pouvais être naïf, innocent, pleurer comme je voulais, elle était là, pour me consoler, et je l’ai compris après, pour me protéger. Je pourrais chanter ses louanges longtemps, mais y a ce sentiment un peu pervers en moi qui au fond m’en rend incapable. L’amertume sans doute. On est très amis elle et moi. Pour en revenir au point, je l’aimais ma mère. Et dès le départ, j’étais persuadé que mon père ne la méritait pas. Pas parce que j’étais complexé et amoureux d’elle en bon p’tit gars que j’étais, mais parce que mon père m’en faisait voir de toutes les couleurs, et que je voulais ou non, mon regard sur les choses s’aiguisait, et je voyais bien qu’ils étaient trop différents tous les deux. Mais que peut-on attendre d’un vulgaire circuit électrique après tout ? Rien de fou. Un mariage comme celui de mes parents. Même si elle l’a cherché, ma mère aurait mérité tellement mieux. Tout ce qui me passionne – me passionnait – me vient d’elle. Pour prendre soin de ma sœur et moi, elle avait mis sa carrière en pause et était devenue professeur à la place. J’étais son premier élève et de loin le plus assidu. Logique, je pouvais passer encore plus de temps avec elle comme ça, plus qu’elle ne passait de temps avec ma sœur qui je crois m’en a un peu voulu pendant quelques temps. Et puis, j’aimais vraiment le piano. Cette sensation quand mes doigts couraient sur les touches noires et blanches, ces mélodies si belles qui me poussaient à aller plus loin, chercher plus compliqué pour faire plus impressionnant, et la façon dont tout mon être était en communion avec l’instrument. Le piano était devenu comme une extension de ma personne, et ça s’était fait très vite parce que j’avais commencé à jouer très tôt. Probablement même avant de savoir compter. Ma mère m’a transmis tout son savoir, et elle ne laissait passer aucune erreur. Quand je rentrais de l’école, je m’installais aussitôt au piano, et elle contrôlait tous mes gestes. Elle était sévère en tant que professeure mais ça ne me gênait pas parce que je gagnais le gros lot chaque fois que je la voyais sourire quand je terminais une partie compliquée – pour mon âge – d’un morceau. Les gamins de mon âge voulaient tous ressembler à leurs pères plus tard mais pas moi. Moi, je voulais être « comme Maman quand je serai grand ». Et je le répétais sans arrêt à qui voulait l’entendre, persuadé dans ma si grande candeur que ça ferait sourire comme ma mère souriait. Le jour où j’ai dit ça au vieux, j’ai compris que non. Mon grand père et ma mère ne s’entendaient pas du tout. Ce n’était un secret pour personne d’autre qu’Aisling et moi. Pour le vieux, en tant qu’héritier, je ne pouvais pas avoir de temps pour ces choses. Il trouvait qu’en plus, ça me féminisait, que j’allais finir gay et ça il ne le voulait pas. Pas qu’il soit totalement homophobe. Il tolère, tant que ce n’est pas son sang. C’est toujours plus simple quand c’est les autres. Bref, il ne voulait pas que je poursuive. Alors ma mère s’en prenait plein la gueule. Je ne le savais pas. Et j’étais trop jeune pour comprendre. La seule chose que je pouvais lui proposer, c’était d’aller jouer quand je voyais qu’elle ne souriait plus. J’étais éveillé quand j’avais cinq ans. Et attentif. Beaucoup trop attentif. C’est probablement pour ça que j’ai vite vu que quelque chose n’allait pas. Au-delà de tout ça, quelque chose n’allait pas, mais je ne savais pas quoi. J’ai compris plus tard.
Cancer.
I hoped you’d be coming back
I know you won’t come back
I know you won’t come back
Un jour, elle a commencé à se plaindre de douleurs. Rien de très grave, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus donner ses cours. Alors ont commencé les allers et retours entre la maison et l’hôpital. Y a un truc que je trouve horrible. Je ne sais pas s’il y a quelque chose que je déteste autant que les hôpitaux. Probablement en fait, parce que je n’aime pas grand-chose. Mais mon aversion pour les hôpitaux atteint des sommets. L’odeur est immonde, les murs trop blancs, le personnel hypocrite. La première fois que ma mère s’est retrouvée à l’hôpital, c’était à la suite d’un malaise. Elle préparait notre goûter à Aisling et moi et soudainement, elle s’est écroulée. Nos cris ont alerté mon père qui pour une fois a su se mettre de côté pour s’occuper d’elle. À l’hôpital, mauvaise nouvelle. C’était une tumeur qui grossissait au niveau du cerveau. Elle était opérable mais il fallait faire vite. Alors ma mère a été prise en charge rapidement. Moi, je savais que quelque chose n’allait pas, alors je pleurais. J’avais cinq ans, qu’est-ce que je pouvais faire d’autre ? Je voulais juste ma mère. Avec Ais, nous étions assis sur ces chaises inconfortables de salle d’attente avec ordre de mon père de ne pas bouger. Alors on a attendu. Longtemps. Tellement que je n’ai plus eu de larmes à verser. Ou peut-être que c’était le regard que m’avait lancé mon père qui m’avait obligé à me calmer. L’attente a été longue. Très longue. Alors quand nous avons vu le chirurgien arriver, nous avons tous sauté de nos chaises. Je n’ai absolument rien compris à ce qu’il racontait. Je voulais juste ma mère. Je ne savais pas que c’était le début d’un long parcours. Après la première opération, elle était méconnaissable. Il avait fallu raser sa tête pour opérer, alors elle n’avait plus de cheveux sur la tête, un horrible bandage à la place. Et surtout, ses yeux ne s’ouvraient pas. Alors évidemment, j’ai paniqué. Aisling aussi, dès qu’elle a senti ma panique. Ce n’était pas un endroit pour des enfants, avait fait remarquer le médecin. Il avait raison. Mais moi je voulais bêtement camper là jusqu’à ce que ma mère puisse rentrer avec moi. C’est arrivé quelques semaines plus tard. La tumeur était a priori bénigne, mais les médecins avaient quand même noté la présence de cellules inquiétantes alors ma mère était sous traitement. C’était un langage que je ne pouvais pas comprendre. Je trouvais juste qu’elle avait de la chance d’avoir autant de bonbons à manger pendant les repas, et j’étais un tout petit peu en colère parce qu’elle était tout le temps trop fatiguée pour jouer du piano avec moi. Mais bon, je l’aimais quand même. Et puis quand elle prenait ses bonbons, ça avait l’air de lui faire du bien. Mais ça avait l’air seulement. L’année suivante, une autre tumeur est apparue. Et cette fois, elle n’était pas bénigne. Et je savais ce que ça voulait dire dans les grandes lignes, j’avais cherché sur Internet. Elle était malade, et c’était grave. Il a d’abord fallu stabiliser son état, trouver le traitement adapté. Ça a commencé par des comprimés encore, et puis les médecins ont réalisé que ce n’était pas suffisant, alors Maman a commencé à aller de plus en plus souvent à l’hôpital. Et pendant un moment, ça a commencé à aller. Je l’ai vue se tarir sous mes yeux, elle avait perdu son énergie, ses cheveux, ses sourcils, mais la flamme qui faisait pétiller son regard commençait à revenir. C’était bon signe. Jusqu’à la rechute peu après qu’Ais et moi ayons fêté notre septième anniversaire. Cette fois ce n’était plus une mais plusieurs tumeurs à plusieurs endroits dans son corps et beaucoup trop vite à mon goût, on a parlé de stade terminal. Ma mère ne pouvait même plus bouger tant elle était faible. Elle restait à l’hôpital. Aller la voir était un combat. Mon père disait ne pas avoir le temps, le reste de sa famille n’aimait pas ma mère alors c’était inutile, et la famille de ma mère était trop loin, même si parfois ses parents venaient, parce que quand même, leur fille était mourante. Mais d’une façon ou d’une autre, Ais et moi on se débrouillait pour la voir. J’aurais aimé garder de meilleurs souvenirs tu sais ? Est-ce que c’est normal que lorsque je pense à ma mère, les seules images qui me viennent, c’est elle en train de crever sur ce lit d’hôpital ? Que je ne voie plus que sa fin, et non tout ce qu’elle a été ? C’est comme si les deux ans où elle a été malade avaient effacé tous les autres souvenirs. Surtout quand celui qui est le plus frais dans ma mémoire est celui de son dernier jour. Je me souviens que je luttais. Je luttais pour elle. Pour qu’elle garde le sourire. Pour qu’elle continue de se battre. Chaque fois, je lui faisais promettre. Je lui faisais promettre qu’elle ne m’abandonnerait pas. Aujourd’hui, je ne fais pas de promesses. Jamais. C’est du vent. Juste de l’air qu’on brasse pour faire gonfler l’espoir. Espoir qui blesse quand on le crève comme un ballon. C’est une des choses que j’ai appris avec ma mère aussi. Le jour où elle est morte, je crois qu’elle savait. Dix-neuf décembre deux mille quatre-vingt-treize. Ma mère avait décidé d’abandonner. Quand on est entré dans la chambre, elle a essayé de m’adresser un sourire. C’était plus une grimace qu’autre chose. Il n’y avait plus aucune énergie dans son regard, elle s’était complètement tarie, fanée. J’avais peur Yuki. Tellement peur. Parce que c’était comme s’il n’y avait déjà plus de vie en elle. Alors je ne sais pas pourquoi j’ai été surpris quand elle a commencé à convulser alors qu’Aisling et mon père venaient de sortir. Je parlais avec elle, sous le regard attentif d’une infirmière et tout à coup, c’était la catastrophe. Je lui avais fait promettre encore tu sais ? Mais je ne savais pas que ce serait la dernière fois. Parce que quand mon père et ma sœur sont revenus, ma mère, elle n’était déjà plus.
Franchement, je ne vais pas passer par quatre chemins pour dire que j’ai mal vécu sa mort. Très mal. J’me suis senti trahi, abandonné. Exposé. J’avais la haine du haut de mes sept piges, l’apogée d’une colère en latence que je n’exprimais pas parce que je ne savais pas ce que c’était. Je me rappelle son enterrement comme si c’était hier. Le vieux a refusé qu’elle soit enterrée dans le cimetière familial. Personne ne savait où il fallait l'enterrer, vu que le vieux avait donné son veto, mais que sa famille voulait qu'elle soit enterrée là où irait le reste de sa famille au Japon, le cimetière Ingawa donc. Tout le monde se disputait pour des broutilles. Et quand ils se sont retrouvés avec l'urne contenant ses cendres entre les mains, la question du lieu est revenue sur la table. Des détails pour moi à l’époque, et ça n’est pas bien différent aujourd’hui. Dans tout ça, ma sœur était effondrée, et à part moi, personne ne s’en préoccupait vraiment. Le soir à la maison, c’était froid, mort. Bien pour rappeler que ma mère n’était plus là. J’ai dû mettre ma rancœur de côté pour consoler ma sœur parce qu’il n’y avait plus que moi pour le faire. Le jour où on a enterré les cendres de ma mère, j’ai scruté les visages, j’ai regardé le monde, vêtu de mon costume bien noir qui me faisait passer pour une citrouille avec mes cheveux trop roux. Et je voyais bien que personne n’était sincère. Je veux dire, tout le monde pleurait, mon père y compris. Pourquoi ? Il ne l’aimait pas. Il ne voyait ma mère que comme une partenaire sexuelle. Rien d’autre. Hypocrite. Et moi ? Moi je regardais les larmes de crocodile sans être capable d’en verser une seule qui serait la plus honnête de toutes.
Je n’ai pas pleuré.
J’étais en colère et je le suis toujours. Si j’avais l’opportunité de voir ma mère, je commencerais par l’insulter dans toutes les langues que je maîtrise. Rien à foutre qu’elle soit ou non ma mère en fait, plus maintenant. Je suis sorti de mon complexe d’Œdipe depuis longtemps et il ne me reste plus que la rancœur. Et celle-là, elle ne disparaitra pas. Probablement pas. Jusqu’à présent, elle est toujours là. Sa mort m’a changé. J’avais tellement de rage en moi que je pouvais plus être ce petit garçon tout gentil, tout doux, qui se laisse marcher sur les pieds. Alors j’ai commencé à avoir quelques soucis à l’école. J’étais trop violent. Je manquais de respect. Je n’écoutais pas. C’était l’expression d’une douleur mais personne ne comprenait. Personne ne pouvait comprendre. Et laisse-moi te dire que quand tu souffres, personne ne comprend jamais. Ils disent comprendre, mais ils mentent. Personne ne comprend. Je devenais ingérable, j’en avais conscience et en un sens, ça me plaisait. Mon père essayait bien de me brider mais à force, j’étais immunisé contre ses coups. Le seul que j’écoutais un peu, c’était le vieux je crois. Et encore. C’était uniquement parce que mon père se plaignait. D’ailleurs, lui non plus n’était pas au meilleur de sa forme. Suivre mes frasques devenait difficile pour lui, disait-il. On a découvert plus tard qu’il avait des problèmes cardiaques. Il n’en avait jamais parlé. Parfois je me dis que ma mère avait peut-être raison. Elle croyait dur comme fer en ces histoires de destin et elle était certaine que le sien et celui de mon père étaient liés. J’ai jamais cru à ces histoires mais quelques mois après ma mère, c’était son mari qu’on enterrait. Crise cardiaque pendant son sommeil. Difficile à croire hein ? Et pourtant, lui aussi, du jour au lendemain, il n’était plus là. J’avais toujours cru le vieux insensible à tout tu sais ? D’ailleurs, il me répète sans cesse que c’est comme ça qu’il faut être, que si tu montres une faiblesse, c’est la mort assurée. Mais le jour où les cendres de mon père ont été mises dans l’urne, je l’ai vu perdre tous ses moyens. Moi ? J’aurais aimé pouvoir dire que sa mort était un soulagement. À mesure que je devenais plus incontrôlable, il devenait plus violent avec moi aussi. Alors j’aurais pu être soulagé. Mais je ne l’ai pas été. J’ai ressenti ce pincement au cœur, et je me suis senti très seul. Pourquoi ? Je veux dire, il n’a jamais été un père. Il ne m’a jamais aimé, et c’est très vite devenu réciproque. Alors je ne comprends pas pourquoi. Pourquoi j’ai ressenti ce manque ? J’ai posé la question autour de moi. Personne n’a su me répondre. D’un autre côté, personne n’a compris ma réaction non plus.
Je n’ai pas pleuré.
Ma sœur, elle, a versé toutes les larmes de son corps. Indésirable peut-être, mais mon père l’aimait bien au fond. J’imagine en tout cas. C’est pas comme si je pouvais vraiment vérifier. J’me dis que j’ai sûrement un truc qui fait que mon propre père n’a pas pu m’aimer. Au moins c’était réciproque. Même si ce n’était pas si simple que ça quand j’avais huit ans. Depuis j’ai appris à me détacher, mais je prenais vraiment beaucoup trop à cœur à l’époque. Je crois que c’est pour cette raison que personne n’a compris mon impassibilité. Parce que j’étais un gosse expressif, impulsif, trop plein d’émotions. Mais moi, je ne savais pas quoi choisir entre pleurer, hurler, péter un plomb ou faire tout en même temps. Alors c’était plus simple de ne rien choisir et de tout garder pour moi. Ça a commencé là je pense. Mes difficultés à parler de ce que je pense ou ressens. Ça vient de là. Ces décès m’ont introverti, et renfermé sur moi. Il n’y avait qu’Ais qui entrait, parce qu’elle était ma sœur jumelle et que la plupart du temps, elle savait ce que je pensais. La connexion. Aujourd’hui encore, je ne sais pas vraiment ce que je pense de tout ça. Enfin, un peu quand même. Je n’aurais rien à dire à mon père. Absolument rien. Ma mère en revanche, je lui vomirais mon amertume à la gueule. Je lui en ai voulu de ne pas s’être battue un peu plus, d’avoir abandonné, de m’avoir abandonné et d’être partie sans moi. Je lui en veux toujours, mais je ne sais pas si c’est pour les mêmes raisons.
We’re all living in a dream
But life ain’t what it seems.
But life ain’t what it seems.
Il y a une personne qui n’a jamais perdu le nord lorsqu’il s’agissait de ma sœur et moi : le vieux. Dans la famille, nous étions pointés du doigt. Après tout, nous n’étions que des orphelins, à moitié étrangers en plus. Alors le nom est entré en jeu. Et le nom a fait la différence. Il fait toujours la différence. Je n’étais pas juste Akira – personne ne m’appelait jamais « Kyle » à part ma mère, et Ais, j’avais l’air suffisamment étranger comme ça apparemment, et puis je ne permettais à personne d’autre de le faire – j’étais Akira Inagawa, et j’ai très vite compris que ce n’était pas rien. C’est comme ça que j’ai été mis au courant de l’implication de ma famille dans la pègre, chose dont ma mère voulait me protéger. J’étais un héritier, et on ne laisse pas un héritier orphelin. Alors c’est sous la tutelle du vieux que nous avons été placés ma sœur et moi. Il avait perdu un fils, mais il gagnait deux petits enfants dont un qu’il pouvait modeler à sa guise. Mais pour ma sœur et moi, ce n’était pas ça. Pas du tout. Alors on a sombré dans une espèce de mutisme, où on ne communiquait vraiment que l’un avec l’autre. On avait l’impression d’être seuls face au reste du monde, ce qui en un sens n’était pas tellement faux. On était vu comme les gosses trop chanceux, tombés dans la bonne famille et qui n’avaient qu’à lever un doigt pour avoir ce qu’ils voulaient. Je crois qu’ils projetaient sur nous ce dont ils rêvaient. Parce que c’était bien loin de se passer comme ça. Le vieux était dur. Et je ne crois pas qu’être sous sa tutelle était une chance. Oui, je suis soudainement devenu le petit roux étranger avec beaucoup d’influence, mais ça aurait été le cas, grand père ou pas. Ce n’était pas la chance, c’était le nom. J’étais devenu insupportable. Le vieux n’avait aucun intérêt à récupérer un gosse à problèmes. En revanche, laissé seul, ce gosse à problèmes pouvait lui poser des problèmes. C’est pour ça qu’il a pris notre garde à Ais et moi. Entre le rêve et la réalité, il n’y a pas de fossé. Non, c’est plutôt un ravin.
Je n’ai pas toujours détesté mon grand-père. Et même aujourd’hui, est-ce que je le déteste vraiment ? Peut-être. Je suis ingrat après tout, c’est dans ma nature. Néanmoins, la réticence est vite née. Il s’est très vite imposé, dans ma vie en particulier. Des études ont montré que jusqu’à l’âge de sept ans, la personnalité d’un enfant était très malléable. Passé cet âge, elle est presque totalement formée, et même si elle peut changer en grandissant, ce n’est rien de majeur. Donc théoriquement, j’avais déjà ma personnalité bien définie lorsque je suis passé entre les mains du vieux. Pourtant, il a réussi à me formater sans problème. Pour ça, je devrais être un peu reconnaissant quand même. Parce que si je n’avais pas changé, s’il ne m’avait pas changé, je me serais fait écraser au sein de la Famille. Je devrais, mais je ne le suis pas. Ça, c’est parce que je suis ingrat. Et parce que je lui reproche certaines choses aussi. J’ai peut-être été naïf, mais jamais je n’aurais imaginé être associé à la pègre quand j’étais petit. Aucun gosse ne rêve de devenir un criminel plus tard après tout. Moi, je voulais devenir pianiste, comme ma mère. Une sorte d’hommage. Je n’étais peut-être plus très studieux en cours, mais pour le piano, j’étais doué. Je me préparais à des concours pour intégrer de grands conservatoires où être un virtuose ne faisait pas la différence. Personne ne croyait vraiment en moi, à part une des sœurs de ma mère qui nous rendait régulièrement visite et qui était prof en conservatoire. C’était elle qui payait mes cours de piano après le décès de ma mère. Elle était certaine que j’y arriverai. Et j’y croyais, jusqu’au jour où le vieux a mis fin à tout ça. Pour lui, le piano c’était dérisoire, affaiblissant, fragilisant, et je devais être un garçon fort. Alors il a fait en sorte que tout s’arrête. Il m’a privé de mon souffle. Je n’étais pas si insensible pour rien tu sais ? Tu me le disais souvent mais je ne le faisais pas exprès. Y a juste beaucoup de choses en moi qui sont mortes. Et bien mortes d’ailleurs. J’éjecte les restes par la fumée de mes clopes. C’était malsain parce que le vieux est un as lorsqu’il s’agit de persuasion, et il a réussi à transformer mon amour pour l’instrument en aversion. Il appuyait là où ça faisait bien mal sans se préoccuper du fait que je n’étais qu’un gamin et que j’aurais sûrement des blocages pour le restant de mes jours. Imagine la réaction de ma tante quand elle a appris que son petit neveu si talentueux ne voulait plus poursuivre. Qu’un conservatoire serait une perte de temps, et qu’il ne voulait plus rien qui le rapproche de sa mère parce que celle-ci avait choisi de l’abandonner. Qu’est-ce qu’on est manipulable quand on est gosse. Très vite, les choses ont commencé à changer, et avant que je ne m’en rende compte, je devenais une toute autre personne. La métamorphose dans mon comportement n’était pas si visible quand j’avais dix ou onze ans. Mais après en revanche… J’avais parfaitement conscience de ce que j’étais devenu en grandissant. Daredevil. Toujours aussi impulsif, mais bien moins émotif. Un peu trop rebelle au goût du vieux. Il voulait un deuxième Tatsuya, mais à la place, c’est celui que je suis qu’il a formé. Et il a vite déchanté. Parce que moi, j’avais du mal avec les règles. Très vite, quand il disait blanc, moi je disais noir. Je faisais à peu près tout ce que je voulais. Parce que je savais que je pouvais. Et ça ne plaisait pas toujours à mon grand-père, mais c’était un peu sa faute, c’est lui qui m’avait rendu ainsi. Alors j’en profitais. L’année de mes quinze ans a été l’année charnière je pense. Avant, j’étais encore un peu entre le puéril et le plus mâture. Après, le puéril a été éjecté. Et je suis entré dans le cycle des premières fois. A quinze ans, je n’étais plus le petit nippon roux que tout le monde pouvait écraser. Comme ma mère, je développais cet air un peu exotique qui faisait qu’on m’approchait pour sociabiliser et non plus pour me harceler. J’ai compris très tôt que lorsqu’on suscite l’intérêt, avec un sourire et les bons mots, on pouvait avoir ce qu’on voulait. Alors j’avais facilement ce que je voulais. Et c’était bon tu sais ? Je n’avais rien à faire. Un exercice pas terminé ? Il y avait quelqu’un. Une clope parce que le vieux avait confisqué mes paquets ? Encore quelqu’un. Besoin de me défouler ? Toujours quelqu’un. Et le mieux ? C’était les filles je crois. Avec elles, pas le moindre effort à fournir si ce n’était sourire. Bien sûr derrière, le vieux guettait. Il tenait à garder son contrôle sur moi. Le truc c’est qu’il l’avait perdu depuis longtemps. Alors ouais, il voulais m’éduquer. Il me faisait avaler ses règles, ses valeurs et celles de la pègre. Je ne retenais que ce qui m’intéressais. Alors il a dû se rendre à l’évidence : j’étais mon propre maître et il avait perdu le contrôle. Alors il m’a confié à quelqu’un d’autre dès qu’il en a eu l’occasion, et dès qu’il a jugé quelqu’un de capable pour la lourde tâche qu’était mon tutorat. C’est comme ça que je me suis retrouvé avec ce type collé au cul.
Alekseï.
You ain’t a kid no more
We’ll never be those kids again.
We’ll never be those kids again.
J’ai été introduit assez tôt au sein de la Famille. C’était logique, j’avais grandi dedans dès la mort de mes parents, je connaissais les règles par cœur même si je voulais pas y obéir. D’ailleurs je ne voulais pas être introduit non plus. Franchement, c’était pas mon but dans la vue de devenir criminel. Mais le vieux ne m’a pas laissé le choix. Pas du tout. Un jour il m’a ordonné de me lever, le soir, j’avais mon premier tatouage et me voilà yakuza. Bon, j'avoue ça n'a pas été aussi simple que ça, et ce n’était pas tellement inattendu, parce qu'on en avait discuté et que j'avais fait la sourde oreille. Je pense que le vieux attendait juste que je sois un peu plus âgé. J’aurais aimé y échapper, mais le nom ne me laissait pas d’autre choix. Alors ça s’est fait plutôt que je ne l’imaginais. Le problème ? J’étais encore jeune. Encore dans cette phase d’enfant rebelle qui voulait son indépendance. Alors quand j’ai appris que le vieux voulait que j’aie un mentor, j’ai vu rouge. Pas uniquement parce qu’il le voulait d’ailleurs. C’était aussi parce qu’il l’avait décidé et qu’il avait choisi la personne qui aurait cette charge sans rien me dire. Je déteste ne pas avoir le choix, et il le savait très bien. Alors quand il m’a parlé d’Alekseï comme étant une personne de confiance qui avait déjà bien fait ses preuves, je me suis fais une idée très claire sur lui. Probablement un grand-père ridé comme le mien, coincé du cul, qui voudrait m’apprendre les règles comme si je ne les connaissais pas. J’ai été surpris lorsqu’il m’a été présenté. Parce que ce n’était pas un vieux déjà. Et parce que quelque chose me disait que ça allait être moins pire que j’imaginais. Alors j’ai souri mon habituel sourire en coin. Celui que le vieux déteste tant parce qu’il sait que ça veut dire que j’ai quelque chose en tête. Je me souviens parfaitement de la tête de mon grand-père. Il avait l’air si satisfait de m’avoir enfin acculé qu’il n’a pas compris pourquoi moi je l’étais aussi. Bien sûr, sur le coup, ça m’a clairement ennuyé. Quand j’ai commencé à accomplir de petites tâches pour la Famille, les gens parlaient, parce qu’il y a toujours des gens pour ouvrir leur gueule. Je passais pour le mec qui avait tout posé sur un plateau d’argent, parce qu’il portait le nom. Alors j’ai ma fierté, tu le sais bien. Ouais, je voulais pas du clan, mais j’allais pas laisser une bande d’imbéciles rabaisser mon travail. Et pour moi, Alekseï comme mentor, c’était carrément l’opposé de ça. J’étais juste le p’tit protégé par un type qui devenait intouchable et j’aimais pas. Mais très vite, j’ai revu mes calculs. Parce qu’au fond, qui pouvait m’emmerder ? Personne. Et ce pouvoir là, entre mes mains, c’était jouissif. Et puis en tant que personne, Alekseï ne m’était pas antipathique. Au-delà de mentor pour le clan, il a aussi été un peu prof quand j’ai décidé de redevenir sérieux en cours. Et puis il me couvait un peu, j’avais l’impression d’avoir un grand frère plus qu’autre chose. Je l’ai apprécié un peu plus quand j’ai réalisé qu’il encourageait ma rébellion. Si dans un monde alternatif, mes relations avec le vieux devaient s’améliorer, ce ne serait certainement pas grâce à lui. Mais je l’aime bien. C’est le principal. Peut-être que j’aimais pas ce que je faisais, mais au moins les choses marchaient bien. Jusqu’à ce que je sorte du placard comme on dit. Je n’y avais jamais vraiment été caché en fait, mais puisqu’on a tendance à mettre des labels pour tout. C’est Aisling qui a su en premier. Je me fichais bien de l’avis des autres, mais le sien comptait. J’avais dix-huit ans, fraîchement entré à Tōdai. Avec ma sœur, on partageait ensemble cet appartement, et elle avait l’habitude de me voir aller et venir avec des gens différents chaque jour. Je profitais, j’étais plus sous le contrôle constant du vieux, et même s’il y avait toujours Alekseï qui tenait le rôle qu’on lui avait attribué, ça n’était jamais aussi insupportable qu’avec mon grand-père. Alors un jour, Ais a été surprise. Je lui avais sorti la même excuse, expliquant que j’allais bosser mes cours avec un binôme le soir. Elle a toujours su ce que ça voulait dire. Mais elle ne s’attendait pas à ce que je rentre avec un mec. Il me semble qu’elle a lâché un cri d’abord, et puis quand elle m’a vu parfaitement calme, elle m’a lancé ce regard, celui qui disait que j’aurais beaucoup à expliquer. Je lui ai adressé un clin d’œil et je suis parti. Pour elle, c’était bon, les autres pouvaient aller se faire foutre.
Je suis resté quelques temps avec ce type mais pas suffisamment pour me rappeler pleinement de lui alors je vais l’appeler Jag. Quand le vieux a découvert pour Jag, ça a été un pré Shukumei. Il est devenu livide. Persuadé que c’était la faute de ma mère si j’étais devenu une pédale. Il m’a hurlé qu’en tant que son petit fils de sang, je pouvais pas être comme ça. Qu’il ne l’acceptait pas et qu’il voulait que je redevienne comme avant. Mais « comme avant », qu’est-ce que c’était ? Parce que pour moi, il y avait eu beaucoup d’avant. Alors j’ai posé la question. Et je crois que même mon père ne m’a jamais giflé comme l’a fait le vieux en guise de réponse. Ça a été le déclencheur. J’ai réalisé à ce moment-là que j’intériorisais vraiment beaucoup de choses. Et tout a fini par sortir à ce moment-là. La vérité, c’est que son avis m'importait peu. Il était venu me confronter, comme s’il avait le pouvoir de faire quoi que ce soit, oubliant que son influence sur moi n’était plus. En fait, c’était surtout l’occasion de lui balancer au visage tout ce que je lui reprochais. Et maintenant ? Je fais toujours ce que je veux de mes fesses. En revanche, ma relation avec le vieux ? Elle doit bien être six pieds sous terre elle aussi.
I was thinking about you
About you.
About you.
Ça commence à faire un moment que je parle dans le vide et je n’ai aucune idée de pourquoi je continue. Mais Ais avait raison, ça fait du bien au fond. Tu sais qu’elle voulait que je voie un psy ? Moi, Akira Inagawa, chez un psy ? Franchement, j’ai ri. Je n’ai jamais eu besoin de parler à quelqu’un, et ça n’arrivera jamais. Je veux dire, oui, j’ai un bagage. Mais le porter seul ça me muscle. Et toi, Yukino, t’as un poids énorme dans ce bagage. Avec Jag, ça n’a pas duré. Je me suis lassé, comme toujours. Et puis je devais quitter le pays pour les études. Direction les Etats-Unis. Bien sûr que j’allais m'amuser, et avec une attache, ce n’était pas possible. Alors bye Jag. Mais tu sais, j’ai jamais cru au coup de cœur, jamais vu la vie en rose. Mon monde à moi était gris et sale. Peut-être que quand j’étais gosse, il y avait plus de couleurs. Je n’étais pas si apathique. Ce voyage, c’était l’occasion de prendre de la distance pour quelques temps. J’avais dix-huit ans, j’étais étudiant, je voulais me préoccuper d’autres choses que des tâches qui m’avaient été confiées au sein du clan. Alors je suis parti. Et toi aussi. Tu faisais partie des étudiants qui partaient aussi, même si ce n’était pas exactement dans le même cadre. Je ne t’avais jamais remarquée avant, alors que tu avais toujours été là. Tu me connaissais déjà, pas moi. Je pensais que ça serait comme d’habitude. J’avais beaucoup de noms pour qualifier mon comportement. Don Juan, beau parleur, et puis plus vulgaire aussi, mais je sais pas, je suis entouré de morts alors je vais éviter les injures. Je ne pouvais pas me sentir offensé, puisque tout ça, c’était la vérité. Ça me glissait dessus comme du beurre au soleil. Je me savais volage, et ça me plaisait assez, parce que les attaches pour moi, ça rime avec problèmes. Et là-dessus, je ne me suis pas trompé. Le fait que tu bouffes les pissenlits par la racine – où que tu les nourrisses en bon terreau, j’en sais rien – en est bien la preuve. Tout a commencé dans cette boîte où on avait décidé d’aller avec les mecs du groupe. Je ne sais pas lequel d’entre eux à penser que ce serait cool de faire une soirée a Japanese in New York, mais finalement, on s’est tous retrouvé dans un club. L’ambiance, l’alcool, les drogues variées, être là alors qu’aucun d’entre nous n’était majeur selon les règles du pays, c’était bon. Tout le monde a profité. J’ai bien profité, toi et moi, on a profité. J’avais tellement d’alcool dans le sang que j’étais encore out lorsqu’il a fallu retourner en cours le lendemain. Mais toi non. Toi, t’étais parfaitement consciente de ce que tu faisais. T’avais un objectif, et c’était moi. Je me souviens qu’on s’est tourné autour un moment. Que ça me plaisait de jouer au chat et à la souris avec cette fille sortie de nulle part que je rencontrais pour la première fois en boîte. On a joué un moment avant de sauter le pas. Pour moi, l’objectif était rempli. J’avais utilisé mon mouchoir, et il était temps d’en prendre un autre. Tu savais que je ne me posais pas. Tu savais que je ne cherchais pas l’exclusivité. Je ne pouvais offrir que de l’éphémère. Tu le savais. Tu le savais, et pourtant, tu as commencé à me harceler. Appels sur appels, messages en cascade, et même les mails ! Tu n’arrêtais pas. Tu ne te démontais pas, même quand je prenais plaisir à te rabaisser, à t’humilier pour que tu me colles enfin la paix. Une grande malade, voilà ce que tu étais. J’avais même mis Aisling sur ton cas, pour qu’elle te pousse à me lâcher, mais rien n’y faisait. Tu me faisais chier. Je voulais vraiment me débarrasser de toi, sans réaliser qu’en fait, tu commençais à t’imposer à moi. Je ne sais pas comment tu t’y es prise. Mais au bout d’un moment, je n’ai plus eu envie de t’humilier. J’ai accepté de te revoir en privé, plus d’une fois, ce que je ne fais jamais. Te témoigner de l’affection en public. Très vite, j’ai tout accepté. Et puis j’ai réalisé que quelque chose avait changé. J’avais changé. Tu as réussi à me rendre pathétiquement sentimental pendant une certaine période de ma vie. Un autre exploit : tu as réussi à me remettre au piano. Tu as ignoré ma haine inexpliquée pour l’instrument, et tu m’as obligé à jouer. Et même si mes doigts ont longtemps hésité sur les touches, même si mes mains tremblaient, même si j’ai plus abattu mes poings sur le clavier que je n'ai joué, tu as patienté. Tu savais que c’était mort et enterré pour moi, mais tu as attendu. Tu as cru. Et je crois que c’était ça le plus fort : tu croyais en moi. C’était bien stupide de ta part, mais mon moi à dix-huit, dix-neuf puis vingt ans aimait ça. Il aimait parce qu’il pouvait se croire encore un peu libre de rêver. Surtout quand tu lui as un jour dit que tu l’aimais. Sur le coup, il ne t’a pas cru. Il s’est méfié. Pour lui, c’était inhabituel, pas naturel. Mais il a fini par accepter, parce que bon, il t’aimait lui aussi. Qu’il était stupide. Il s’est laissé croire que tu allais durer. Que toi et lui, c’était à jamais. Qu’est-ce que j’étais stupide encore à vingt ans. Ça n’a pas duré. Rien ne dure jamais, et j’ai dû le comprendre malgré moi. Du jour au lendemain, tu avais disparu. Pas un mot, ni aucun contact. Tu n’étais juste plus là. Je crois qu’à partir de là, j’ai commencé à te détester. Parce que ça m’avait fait mal, plus que je ne pouvais l’imaginer. Après tout, je t’aimais.
I opened my eyes
It was only just a dream.
It was only just a dream.
Heureusement pour moi, j’ai vite réalisé la bêtise qu’étaient les sentiments. Je suis pas resté longtemps dans le bain du pathétisme. En fait, assez vite, ça m’a énervé de ne penser qu’à toi, à ton départ et à ton manque évident de communication. Ça m’a énervé au point que tout était source d’irritation. Alors j’ai écourté mon séjour et je suis revenu aux sources. Bien sûr que le sale et l’ignoble me feraient me sentir mieux. J’étais prêt à faire n’importe quoi pour le compte du vieux, tant que j’avais un truc à faire. Je suis devenu exécrable. Les tenanciers de bars commençaient à me connaître. Non, je n’ai pas sombré dans l’alcool comme un foutu fragile. J’y allais parce que c’était les meilleurs terrains de chasse que je pouvais avoir. Finalement, la seule chose qui a témoigné de ce que j’avais vraiment été blessé, c’est que je n’ai eu aucune conquête féminine pendant un moment. Je voulais un abruti qui allait prendre soin de moi et mon fessier pendant une nuit avant de passer au suivant. J’avais retrouvé ma routine, et tout allait pour le mieux, sauf que, un jour comme ça, tu t’es pointée chez moi, sortie de nulle part, comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes. Pas un « désolée », rien. T’as osé m’appeler Kyle et passer plus de cinq secondes sur le seuil de ma porte. Alors je t’ai aboyé de dégager. Je ne voulais plus rien avoir à faire avec toi. T’étais franchement la dernière des personnes sur la planète avec qui je voulais partager mon oxygène, et c’était beaucoup dire sur à quel point j’avais appris à te haïr. Tu es partie, pour revenir peu de temps après, les bras chargés d’un bébé qui ne ressemblait à rien – soyons honnêtes, qu’y a-t-il de beau à un gosse qui vient de naître ? – et tu me l’as donnée, expliquant qu’elle s’appelait Tora et que c’était la mienne. Ah. Surprise, surprise ! J’ai commencé à hurler, donc la gamine s’est mise à pleurer, et toi, tu as dû nous calmer tous les deux. La petite, c’est allé vite. Moi, il a fallu un peu plus de persuasion. Mais j’ai fini par céder. Je te cédais toujours. Je ne savais pas que cette fois en revanche, ça allait te tuer. Le baiser de la mort n’aura jamais été aussi littéral.
Pendant la nuit, j’ai dû appeler ma sœur. Il me fallait de l’aide où j’allais faire voler Tora à travers l’appartement pour tester son aérodynamisme. Aisling était en pleine soirée, mais elle est revenue m’aider malgré tout. Vers trois ou quatre du matin, la gamine s’était remise à hurler. Bien évidemment, je hurlais en retour, mais ça ne semblait pas être d’une grande efficacité. Si ma sœur ne faisait pas vite, j’allais vraiment déconner avec cette chose à la gueule rougie qui pissait dans ma chemise en guise de couche. Alors l’appel a été plutôt tendu. Je ne me suis relaxé que lorsque j’ai eu la certitude que ma sœur se mettait en route. J’ai abandonné mon portable dans un coin, et je me suis assis sur la table basse avec un soupir. Tora s’était soudainement calmée, et depuis le canapé où elle était installée, elle me regardait en gazouillant, ses bras et ses petites mains potelées agités de tous les côtés. Et pendant que je la regardais comme ça, je crois qu’il y a eu connexion. Elle avait peut-être une belle imbécile pour mère, mais cette gamine – ma fille – méritait que je l’aime.
When I run out of air to breath
It’s your ghost I see
It’s your ghost I see
Tu sais Yuki, les nouvelles de ton décès sont allées très vite. Est-ce que c'était parce que j'avais des contacts partout ? Parce que notre relation, même à l'étranger, n'avait eu, d'une manière ou d'une autre, aucun secret pour personne ? C'est vrai, à mon retour, tout le monde savait déjà. Sûrement Aisling. Mais en tous les cas, de la même façon que tout le monde a su pour toi et moi, et pour Tora, tout le monde a su aussi pour ta mort. Tous avant moi. C'était le genre de moment où tu sais qu'il y a un truc qui se trame mais tu ne sais pas exactement quoi. Tu sens cette espèce de tension malsaine, porteuse de mystères et de malheurs, mais tu n'as pas la moindre idée de ce qui se cache. Ce jour-là, j'avais emmené Tora chez le doc avant de rentrer. J'étais crevé, journée de travail chargée. Enfin, travail… Tu vois bien de quoi je parle. Et Ais m'attendais à la maison. A sa tête j'ai tout de suite compris que quelque chose n'allait pas. Elle m'a lancé un de ses regards que je ne supportais plus. Celui qui voulait dire « Désolée, j'ai mal pour toi » comme à l'époque où j'étais victime de harcèlement à l'école quand on était gosse à cause de ma démarcation physique – c'est fou ce que les gens peuvent être méchants quand ils sont incapables de définir ce que tu es. La phobie de la différence. Et ce regard, j'avais appris à ne plus le supporter. Alors elle m'a laissé aller coucher la petite. Et elle m'a ensuite fait asseoir pour qu'on discute. Je ne le sentais pas tu sais Yuki ? Pas du tout. Dès qu'elle a commencé à parler, j'ai senti mon estomac se resserrer. Est-ce que tu peux imaginer comment j'me suis senti ? Comment j'me sens encore ? Est-ce que tu t'es même posé cette question Yuki ? Savoir ce que je ressentirais, comment j'le vivrais ? Aujourd'hui encore j'me demande comment tu as pu être si conne ! Si égoïste envers ta fille, envers moi. J'ai eu mal comme je n'avais jamais eu mal Yukino. Ma sœur a attendu que je m'apaise pour tout me dire. La raison de ton départ, les motifs de ton choix. Elle m'a dit que tu es allée la voir après m'avoir vu. Que tu as pris le temps de tout lui expliquer parce que tu savais que tu t'étais condamnée. Et que les miliciens sont venus te prendre alors que tu lui parlais encore. Que tu ne t'es même pas débattue, que c'était inutile. Pas une larme, juste un sourire. Elle n'a pas compris pourquoi. Elle m'a simplement dit que tu n'étais pas triste. Que tu avais tenté de ne pas penser à cette solution. Mais qu'après la naissance de Tora, ce n'était plus possible. Alors tu as pris ta décision.
Pour ça Yuki, je t'ai détestée. Mais plus que toi, c'est le système que j'ai haï. Quand Ais a terminé de tout me dire, je suis sorti. Je voulais être tranquille. Seul. Cette nuit-là, j'ai dû faire toutes les conneries du monde. Pour faire passer ma rage, ma colère, et puis très vite, ma tristesse. J'ai passé le reste de la nuit au piano lorsque j'ai décidé de rentrer. Parce que tu aimais ça, parce que peut-être, naïvement, bêtement je croyais que tout ça n'était qu'un rêve, que faire ce que tu aimais m'en ferait sortir. Mon cœur criait, hurlait. Mes pensées étaient assaillies par le poids de la réalisation. Et je me suis demandé, et si je n'avais pas été là ? N'étais-je pas finalement le fautif, le coupable ? Indirectement, le meurtrier ? Tout était ma faute. Je le savais et c'était insupportable. Ça me rendait dingue. Le foutu sentimental était de retour. Mais là encore…
Je n’ai pas pleuré.
Puis est venu le jour où on t'a enterrée, de façon symbolique. Evidemment, je suis venu. J'ai assisté à la cérémonie, avec Aisling, avec Tora, ta famille, ceux qui tenaient à toi autant que moi. Tous ont parlé de toi, on fait leurs discours et éloges. Et moi ? Je n'ai rien dit, rien fait. Je sentais les yeux sur moi, j'entendais les murmures, j'avais l'impression que tous savaient ce que j'avais ignoré tant de temps. « C'est lui le fils Inagawa non ? C'est à cause de lui ? C'est lui le coupable ? Qu'est-ce qui peut sortir de bon des yakuzas de toute façon ? ». Je n'ai jamais su si j'imaginais ces paroles, où s'ils les disaient vraiment. Mais à cause de ça, j'étais bien plus incapable de dire quoi que ce soit. J'ai simplement passé le micro, et je me suis tu. Bien sûr que j'étais coupable. A-t-on déjà vu un assassin venir enterrer sa victime ? J'étais pourtant certain de ne pas avoir emmené avec moi le boulet du bourreau. Amère réalité que la mort d'un être cher. Une seconde fois...
Kyle A. Inagawa
Si t'es sage, t'auras un badge
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Kyle A. Inagawa
Akira Inagawa
Je ne reflète pas ce que je suis. Pourri.
Where did I come from ?
Where did I go wrong ?
I lost a friend
Somewhere along in the bitterness.
I lost a friend
Somewhere along in the bitterness.
Il y a ce p’tit gars que j’ai rencontré un jour sur le campus. Damon. Un bon type, je suis sûr que t’aurais bien eu pitié de lui si tu l’avais rencontré. Moi j’ai pas eu pitié. Je sais pas faire ça. J’avais quatre ans de plus et il étudiait le commerce aussi alors en bon aîné, j’ai commencé à l’aider un peu. Il avait quelque chose qui me poussait à vouloir l’aider. Peut-être parce que je me reconnaissais un peu en lui. La connexion s’est faite le jour où je l’ai retrouvé à moitié mort dans une rue. Je me suis demandé plusieurs fois pourquoi il en était arrivé là. Pourquoi vouloir se priver de sa vie de ses propres mains ? On a appris à se connaître ensuite, et j’ai compris pourquoi je voulais vraiment l’aider. Les démons avec lesquels il luttait, moi je les connaissais bien. Mais c’était peut-être un peu hypocrite de ma part, et peut-être sans espoir pour lui. Après tout, moi je n’avais rien réglé en ce qui concernait mes propres problèmes, et franchement, je ne comptais pas le faire. À quoi bon ? Je n’avais pas le temps de chercher à réparer des choses déjà en ruines depuis bien longtemps. Mais pour Damon, je croyais qu’il y avait encore le temps. Alors ok, oui, j’ai commis une erreur en acceptant de lui fournir des drogues pendant quelques temps. Mais c’était toujours mieux que de guetter des traces de mutilation sur son corps. J’ai fait ce que j’ai pu. L’obliger à voir un psy – même si moi je n’irai jamais – essayer de lui faire ralentir sur les doses qu’il prenait en refusant finalement de lui donner quoi que ce soit. Même lui apporter un peu de joie en lui laissant Tora. J’avoue, j’en profitais beaucoup parce que je n’avais pas toujours le temps d’être avec elle, mais l’idée était là. Je comprenais bien ce qu’il vivait, et si moi j’avais réussi à me détacher, lui non. Il en donnait l’impression mais ce n’était pas le cas. Lui, ses parents étaient bien vivants, pas les miens. Quand il y a eu le tsunami et qu’il a perdu son appartement, je lui ai permis de rester chez Ais et moi quelques temps parce que nous avions eu la chance d’être épargnés. Je crois que pendant cette courte période, il allait bien. Plus ou moins. Va-t-on bien lorsqu’on est dépressif ? Dam disait oui, mais la vérité, c’est que c’était non. Et je m’en suis voulu de ne pas m’en être rendu compte, de ne pas avoir lu entre les lignes, de l’avoir cru alors qu’au fond on se ressemblait. Je sais pourtant que je suis un bel hypocrite et un bon menteur. Si je cache bien mes émotions, Dam aussi s’en sortait plutôt bien. J’ai manqué de discernement. Il s’est suicidé il y a quelques temps. Overdose. Bien sûr, cette fois, je ne prends pas toute la culpabilité. J’ai simplement le sentiment de ne pas en avoir fait assez. Est-ce que tu peux imaginer que ses soi disant parents n’ont même pas eu la décence de prévoir un enterrement digne ? Jusqu’à quel point peut-on être négligeant ? Ça aussi, ça m’a affecté plus que je ne le voulais. Pas autant que ta mort ou celle de ma mère, mais suffisamment. Je veux dire, j’y tenais à ce bonhomme. C’était peut-être pas une bonne chose étant donné que le peu de choses auxquelles j’ai tenues sont maintenant enterrées. C’est pour ça que les attaches c’est pas mon truc. Jusqu’à présent, ça s’est toujours soldé par une mort. Ça vient peut-être avec le fait d’être yakuza. Il paraît qu’on est rarement de bonne augure. Mais que veux-tu ? C’est la vie, non ?
Qu’est-ce vous en saurez de toute façon ? Vous êtes morts.
This is me
Tu te regardes dans cette glace avec un sourire, appréciant le reflet de ta personne qu'elle te renvoie. Ce n'est pas que tu sois narcissique, pas vraiment. Mais ne doit-on pas être capable de reconnaître ses atouts lorsqu'on les a devant soi ? Tu ne vas pas te priver de te dire que tu es beau Kyle. Tu le sais, et c'est une évidence pour tous. Ça n'a pas toujours été le cas. Comme tu n'as pas toujours été aussi confiant. Aujourd'hui, tu te dis juste que le reste du monde était bien trop aveugle pour voir à l'époque. Ou que les taches de rousseurs qui parsemaient ton visage mais qu'on ne voit pratiquement plus aujourd'hui ne te mettaient pas nécessairement à ton avantage. Mais les choses ont changé. Beaucoup de choses ont changé. A commencer par toi. L'innocence et la candeur qui se lisaient autrefois sur ton visage ont bien vite été remplacé par un lot de sourires tous très bien calculés, qui ne dévoilent rien d'autre que tes dents bien alignées. Lire tes expressions pour savoir ce que tu penses ? Impossible. Dans ton milieu, il faut savoir être neutre dans ce genre de chose. Que ce soit au sein du clan, ou lorsque tu bosses avec des entreprises, ne rien traduire est une base. Et ça, tu as appris à bien le faire. Maître dans l'art ? Non. Mais presque.
Tu fixes les deux iris vert émeraude qui pétillent dans ce miroir. Cet éclat particulier, tu le tiens de ta mère. De même que leur couleur. Le regard joueur, malicieux. Tu sais t'en servir, pour convaincre, pour persuader, pour intimider. Le regard est parfois si important dans la communication. Et savoir s'en servir aide beaucoup. T'aide beaucoup. Parce que lorsqu'il suffit d'un regard pour te faire comprendre, les efforts que tu as à faire ensuite sont minimes. Tu ne qualifierais pas ton regard de chaleureux, ni froid. Il n'est rien en fait. Ou s'il est quelque chose, alors il serait un caméléon. Et il renverrait ce que la situation lui impose de renvoyer. Jamais de la douceur, jamais de la tristesse, ou si douceur il y a, c'est envers ta fille. Et ta sœur et son fils. Personne d'autre. Il y a eu d'autres personnes. Il n'y en aura plus. Parfois, tu recouvres tes yeux d'une paire de lunettes. Un atout de plus à ton charme.
Tu tires la langue un court instant, observant le bijou qui trône sur ta langue, ne sachant pas encore si tu vas le changer ou non. Optant pour le garder tel quel, tu changes en revanche les deux bijoux de ton oreille droite, remplaçant les deux petites boules qui ornaient le lobe et le cartilage par deux anneaux argentés. Après quoi, tu détaches ta chevelure mi longue pour y apporter ton attention. Tu en prends soin, peut-être plus qu'une fille. De façon générale, tu prends soin de toi, mais de tes cheveux, plus encore. Tu y nattes des tresses avant de les attacher. Cette chevelure de feu, rousse, que tu as fait tendre vers un rouge flamboyant. Ces cheveux que tu as tant détesté quand tu étais plus jeune. Aujourd'hui, elle est ta fierté, grâce à elle, tu te démarque. Il y a toujours ceux qui ont des préjugés, ceux qui ne voient en toi qu'une espèce de métis à moitié japonais. Mais il y a également ceux, et heureusement plus nombreux, qui savent reconnaître la beauté lorsqu'ils la voient. Raison pour laquelle tu ne négliges pas ton visage. Tes traits sont doux, fins, mais pas trop non plus. Tu n'es pas de ceux qui ont une mâchoire carrée ou un visage anguleux, et c'est probablement pour cela qu'on a tant remis ta masculinité en cause étant petit. Aujourd'hui, tes traits sont suffisamment virils pour qu'il n'y ait plus le moindre doute. Tout sur ton visage a son charme. Les fossettes qui se forment lorsqu'un large sourire vient étirer tes lèvres encore plus sans doute. Oh oui, tu as une belle gueule Kyle, et tu n'hésites pas à t'en servir.
C'est un atout. Majeur dira-t-on, parce que du reste, tu n'es pas spécialement imposant. Oh, tu es bien construit, c'est un fait. Tu ne passes spécialement tout ton temps à modeler ton corps, mais le sport que tu pratiques a suffi à te dessiner les muscles que tu possèdes. Tu es très loin d'être une baguette rigide ou une brindille qui plierait au moindre souffle de vent. Mais pour autant, tu n'es pas non plus bodybuildé. Tu as ce qu'il faut, ce qui plaît. Mais du haut de ton mètre soixante quinze, et avec tes soixante-dix kilos, tu ne dois pas ta capacité à savoir menacer ou intimider et t'imposer à ta carrure. Ce doit plus être lié à ta façon de communiquer, verbalement ou non, que tu as appris à maîtriser. Ceci dit, ta taille face à plus grand que toi n'a jamais été un problème lorsque tu te battais avec tous sans réfléchir. D'ailleurs, tu as gardé des marques de cette période, des cicatrices sur les bras, le torse, et les phalanges qui n'étaient jamais épargnées. Les autres ont fini par disparaître avec le temps.
Si les plus évidentes n'avaient pas fini par disparaître, peut-être les aurais-tu recouvertes de tatouages ? Parce que de ce côté là, tu n'es pas en reste non plus. Tu as fait tes premiers tatouages dès que tu en as eu la possibilité, le premier étant ton tatouage de clan. Ce tigre rugissant qui s'enroule autour de toi, depuis le bas de ton dos, et qui vient ouvrir sa gueule sur ton torse. Même si au début, tu n'appréciais pas spécialement ce tatouage à cause de ce qu'il impliquait, tu as fini par t'y faire. Plus que ce qu'il signifie, tu préfères regarder à ce qu'il représente. Et le fauve te sied à merveille. Deux tatouages aux motifs tribaux viennent encore orner ton corps, l'un glissant le long de ta nuque, et l'autre épousant les courbes de ton bras gauche, enroulant fièrement les muscles dont il fait le tour. Enfin, un dernier tatouage trône sur ton aine gauche, parce que tu devais bien mettre tes abdominaux en valeur, ou attirer le regard vers des choses intéressantes…
Tu quittes ta salle de bain, et te diriges vers tes armoires. Aujourd'hui, tu es censé avoir une réunion importante avec un client, pour discuter stratégie et autres artifices du genre. La logique imposerait un costume. Tu les regardes un à un sans jamais t'arrêter dessus. Tu n'es pas de ceux qui tapent dans l'élégance à tout instant, bien à l'aise dans des costumes trop étroits, retenant leur souffle pour ne pas faire sauter les boutons de leur chemise. Oh bien sûr, tu sais être élégant, mais uniquement lorsque tu juges l'élégance être d'une extrême nécessité, ce qui est très rarement le cas. Le fait est que tu as horreur des costumes et tout ce qui peut ressembler à une cravate ou un nœud papillon. De façon générale, tu optes toujours pour des jeans, des sweats, des débardeurs, des vestes, et la seule raison pour laquelle tu ne démultiplies plus les cuirs, c'est parce que tu as réduit la fréquence de tes virades à moto pour une voiture à cause de ta fille encore petite. Les chaussures bien cirées ne sont pas tes amies, tu es bien plus à l'aise dans des chaussures confortables et passe-partout comme des baskets pour te déplacer rapidement. Parce que tu n'es pas exactement la définition du mec lent. Même si tout dans ta démarche traduit le félin, tu as tendance à aller plutôt vite, ce qui parfois frustre Tora et ses petites jambes… Si tout le monde autour de toi apprécie la rigueur et la tenue, tu es toujours celui qui se démarque Kyle, et pas seulement à cause de tes cheveux. Ne jamais rien faire comme les autres… Jamais.
Tu n'auras pas la prétention de dire que tu as les allures d'un dieu grec, mais tu ne t'empêcheras pas d'y penser. Tu es beau, et tu te sais beau Kyle. Y a-t-il un mal à cela ?
Tu fixes les deux iris vert émeraude qui pétillent dans ce miroir. Cet éclat particulier, tu le tiens de ta mère. De même que leur couleur. Le regard joueur, malicieux. Tu sais t'en servir, pour convaincre, pour persuader, pour intimider. Le regard est parfois si important dans la communication. Et savoir s'en servir aide beaucoup. T'aide beaucoup. Parce que lorsqu'il suffit d'un regard pour te faire comprendre, les efforts que tu as à faire ensuite sont minimes. Tu ne qualifierais pas ton regard de chaleureux, ni froid. Il n'est rien en fait. Ou s'il est quelque chose, alors il serait un caméléon. Et il renverrait ce que la situation lui impose de renvoyer. Jamais de la douceur, jamais de la tristesse, ou si douceur il y a, c'est envers ta fille. Et ta sœur et son fils. Personne d'autre. Il y a eu d'autres personnes. Il n'y en aura plus. Parfois, tu recouvres tes yeux d'une paire de lunettes. Un atout de plus à ton charme.
Tu tires la langue un court instant, observant le bijou qui trône sur ta langue, ne sachant pas encore si tu vas le changer ou non. Optant pour le garder tel quel, tu changes en revanche les deux bijoux de ton oreille droite, remplaçant les deux petites boules qui ornaient le lobe et le cartilage par deux anneaux argentés. Après quoi, tu détaches ta chevelure mi longue pour y apporter ton attention. Tu en prends soin, peut-être plus qu'une fille. De façon générale, tu prends soin de toi, mais de tes cheveux, plus encore. Tu y nattes des tresses avant de les attacher. Cette chevelure de feu, rousse, que tu as fait tendre vers un rouge flamboyant. Ces cheveux que tu as tant détesté quand tu étais plus jeune. Aujourd'hui, elle est ta fierté, grâce à elle, tu te démarque. Il y a toujours ceux qui ont des préjugés, ceux qui ne voient en toi qu'une espèce de métis à moitié japonais. Mais il y a également ceux, et heureusement plus nombreux, qui savent reconnaître la beauté lorsqu'ils la voient. Raison pour laquelle tu ne négliges pas ton visage. Tes traits sont doux, fins, mais pas trop non plus. Tu n'es pas de ceux qui ont une mâchoire carrée ou un visage anguleux, et c'est probablement pour cela qu'on a tant remis ta masculinité en cause étant petit. Aujourd'hui, tes traits sont suffisamment virils pour qu'il n'y ait plus le moindre doute. Tout sur ton visage a son charme. Les fossettes qui se forment lorsqu'un large sourire vient étirer tes lèvres encore plus sans doute. Oh oui, tu as une belle gueule Kyle, et tu n'hésites pas à t'en servir.
C'est un atout. Majeur dira-t-on, parce que du reste, tu n'es pas spécialement imposant. Oh, tu es bien construit, c'est un fait. Tu ne passes spécialement tout ton temps à modeler ton corps, mais le sport que tu pratiques a suffi à te dessiner les muscles que tu possèdes. Tu es très loin d'être une baguette rigide ou une brindille qui plierait au moindre souffle de vent. Mais pour autant, tu n'es pas non plus bodybuildé. Tu as ce qu'il faut, ce qui plaît. Mais du haut de ton mètre soixante quinze, et avec tes soixante-dix kilos, tu ne dois pas ta capacité à savoir menacer ou intimider et t'imposer à ta carrure. Ce doit plus être lié à ta façon de communiquer, verbalement ou non, que tu as appris à maîtriser. Ceci dit, ta taille face à plus grand que toi n'a jamais été un problème lorsque tu te battais avec tous sans réfléchir. D'ailleurs, tu as gardé des marques de cette période, des cicatrices sur les bras, le torse, et les phalanges qui n'étaient jamais épargnées. Les autres ont fini par disparaître avec le temps.
Si les plus évidentes n'avaient pas fini par disparaître, peut-être les aurais-tu recouvertes de tatouages ? Parce que de ce côté là, tu n'es pas en reste non plus. Tu as fait tes premiers tatouages dès que tu en as eu la possibilité, le premier étant ton tatouage de clan. Ce tigre rugissant qui s'enroule autour de toi, depuis le bas de ton dos, et qui vient ouvrir sa gueule sur ton torse. Même si au début, tu n'appréciais pas spécialement ce tatouage à cause de ce qu'il impliquait, tu as fini par t'y faire. Plus que ce qu'il signifie, tu préfères regarder à ce qu'il représente. Et le fauve te sied à merveille. Deux tatouages aux motifs tribaux viennent encore orner ton corps, l'un glissant le long de ta nuque, et l'autre épousant les courbes de ton bras gauche, enroulant fièrement les muscles dont il fait le tour. Enfin, un dernier tatouage trône sur ton aine gauche, parce que tu devais bien mettre tes abdominaux en valeur, ou attirer le regard vers des choses intéressantes…
Tu quittes ta salle de bain, et te diriges vers tes armoires. Aujourd'hui, tu es censé avoir une réunion importante avec un client, pour discuter stratégie et autres artifices du genre. La logique imposerait un costume. Tu les regardes un à un sans jamais t'arrêter dessus. Tu n'es pas de ceux qui tapent dans l'élégance à tout instant, bien à l'aise dans des costumes trop étroits, retenant leur souffle pour ne pas faire sauter les boutons de leur chemise. Oh bien sûr, tu sais être élégant, mais uniquement lorsque tu juges l'élégance être d'une extrême nécessité, ce qui est très rarement le cas. Le fait est que tu as horreur des costumes et tout ce qui peut ressembler à une cravate ou un nœud papillon. De façon générale, tu optes toujours pour des jeans, des sweats, des débardeurs, des vestes, et la seule raison pour laquelle tu ne démultiplies plus les cuirs, c'est parce que tu as réduit la fréquence de tes virades à moto pour une voiture à cause de ta fille encore petite. Les chaussures bien cirées ne sont pas tes amies, tu es bien plus à l'aise dans des chaussures confortables et passe-partout comme des baskets pour te déplacer rapidement. Parce que tu n'es pas exactement la définition du mec lent. Même si tout dans ta démarche traduit le félin, tu as tendance à aller plutôt vite, ce qui parfois frustre Tora et ses petites jambes… Si tout le monde autour de toi apprécie la rigueur et la tenue, tu es toujours celui qui se démarque Kyle, et pas seulement à cause de tes cheveux. Ne jamais rien faire comme les autres… Jamais.
Tu n'auras pas la prétention de dire que tu as les allures d'un dieu grec, mais tu ne t'empêcheras pas d'y penser. Tu es beau, et tu te sais beau Kyle. Y a-t-il un mal à cela ?
Caractère
Lui
Vif. Ce type a l'œil. Il est bon dans ce qu’il fait et il le sait. Alors évidemment, ça crée assurance et beaucoup d'arrogance. Énormément. Ce doit être la première chose qu’on voit lorsqu’on le rencontre pour la première fois. C'est presque comme s’il transportait son arrogance si flagrante dans une aura qui flotte autour de lui à chacun de ses pas. Tout dans ses gestes, ses regards et même ses sourires transpire ces deux traits. Arrogance et assurance. Et à cela s’ajoute une fierté olympique. Je ne pense pas qu’il puisse concéder beaucoup de choses aux gens ni être très habile avec les mots dans ses relations privées. Si tant est qu’il en ait d’ailleurs. On pourrait lui coller l’étiquette « Don Juan » sur le front sans problème. Il est professionnel certes, mais ne se refuse pas de beaux rentre-dedans avec les gens de la compagnie. Un type comme ça ne doit pas avoir rencontré l’amour une fois dans sa vie. C’est un beau parleur. Un sacré bon beau parleur.
Quoiqu’il en soit, je ne peux pas lui retirer le fait qu’il soit malin et doué dans son travail. Je ne pense pas qu’il soit consultant pour beaucoup d’entreprises. Mais il est monstrueux avec les gens avec qui il bosse. Je n’ai pas aimé me retrouver face à lui lors d’une de nos sessions de formation durant laquelle nous avons revu nos stratégies de négociation. Sûr de lui, le regard perçant, il manipule les mots avec aisance et tape aux endroits bien douloureux. Je ne crois pas qu’on lui refuse grand-chose dans sa vie personnelle. C'est un vrai requin. En tous cas, si refus il y a, il doit se débrouiller sans trop de mal pour que le non devienne un oui. Il y a des fois où je l’ai vu convaincre sans trop de mots, juste par une gestuelle appuyée. Un artiste du baratin cet Akira Inagawa. En fait, il sait communiquer à merveille. Une lacune pour beaucoup, un gros avantage pour lui. Et puis d’un autre côté je me dis que son nom doit aider. Énormément. Oh bien sûr, il n’y a pas que ça. S’il avait été incompétent, même son nom aurait été inutile. Mais il ne l’est pas. Il est à cent pour cent investi dans son travail, il ne tolère pas l’échec, et son manque flagrant de patience le rend – et nous aussi, qui faisons appel à ses services – très efficace. Dès qu’il s’agit du travail, il est assez carré, sauf s’il a repéré quelqu’un avec qui flirter. Mais vraiment, il n’accepte pas un travail si c’est pour participer au redressement de personnes qu’il juge incompétentes. Avec son métier, l’œil doit forcément s’aiguiser. C’est pourquoi je pense qu’il n’a pas de mal à décider ce qui en vaut ou non la peine. Donc oui, il n’y a pas que le nom. Du moins, la personne porte très bien le nom.
Eux.
Nerveux. Quand j'entends Inagawa, je pense nerveux. Facilement irritable. À une époque, il suffisait de le regarder de travers pour avoir une chance de se prendre son poing en pleine gueule. J'l'ai expérimenté. Petit, mais il a une sacrée droite. Enfin droite… Il est gaucher mais vous saisissez l’idée. J'sais pas où ni qui lui a appris à se battre comme ça mais c’est quelque chose. Le moins que j'puisse dire c'est qu'il aimait ça à un moment. Casser d'la gueule. Ou voir d'la gueule se faire casser. Il est un peu perfide, pas mal vicieux. Il frappe pas tout le temps, presque jamais même. Il regarde avec un sourire, un air chaleureux et quand c’est terminé, que ton visage ne ressemble plus à rien ou presque, il se penche sur toi, t'impose son p'tit corps quand toi en face t’as sans mal le mètre quatre-vingt-dix et que tu peux lui enlever quinze ou vingt centimètres, et il te demande tout gentiment si t'as apprécié le service. Si la visite t'a fait plaisir. Si t'essaieras encore de le plumer.
Inagawa, c'est le mec à avoir de son côté tu vois ? Ou du moins, toi, fais en sorte d’être de son bon côté. Les gens qu’il n’aime pas savent très bien qu’ils ne sont pas aimés et franchement, être rabaissé par ce type, c’est pas agréable. Une âme trop sensible pourrait p’t’être même se jeter du haut d’un pont pour ne plus entendre ses remarques acerbes, cyniques, perfides et j’en passe. Nan vraiment, vaut mieux vite se ranger avec lui. D’habitude, on se fie pas aux jeunots dans son genre dans le milieu. Les p'tits qui n’ont même pas la trentaine ont cette tendance à vite prendre la grosse tête, et en général, ils tiennent pas bien longtemps et sont vite dégagés par les yakuzas ou par des trafiquants plus influents. Mais ce type-là, il s’en sort plutôt bien dans son domaine depuis qu’il est là. Et puis, comme c’est l’un des leurs lui aussi... Pas étonnant qu’il s’en sorte.
C’est pas un mec bien patient Akira Inagawa. Mais il est réglo. Efficace. Tant qu’on ne marche pas sur ses plates-bandes ou qu'on n'essaie pas de le tromper. C'est le genre de mecs qui ont la menace facile et l'action encore plus. On ne pourra jamais lui reprocher de manquer de franchise. Je crois même qu’il ne ment jamais. Honnête malhonnête. Mais ce qui est le plus dérangeant, c’est que le bonhomme est doué pour cacher ses émotions quand il en a besoin. C'est un type toujours souriant, souvent expressif, mais pas pour exprimer le fond de sa pensée. C’est le genre à blaguer avec toi et à t’en mettre plein la gueule la minute qui suit. Je me souviens une fois, j'avais raté ma deadline. Il est venu me voir lui-même. Souriant, chaleureux, j'me suis douté de rien jusqu’à ce qu'il évoque mon retard. Ce type est étrangement calme quand il s’agit d'affaires. Verre en main, il était confortablement installé. Rien dans sa voix ne trahissait son impatience. Parce que non, il n’est pas l'exacte définition de la patience, mais ça, je vous l’ai déjà dit. Quand il a vu la panique sur mon visage, son sourire s’est étiré. Il savait que j'savais, que j’avais compris, et que j’allais m’en prendre plein la gueule.
Je crois pas qu’il puisse se sentir coupable de quoi que ce soit ou avoir des remords quelconques. Ou de scrupules. Rien de tout ça. Inagawa, tu l'prends pas pour un con sans que ça te retombe dessus. Parce qu’il développe de la rancune facilement. Et il rend tous les coups, même les plus bas. Contrairement à ce qu’on croit, et même s’il aime voir des têtes voler, ce type est pas un grand violent, dans le sens où la plupart du temps, les autres tapent pour lui. Quand il frappe lui-même cela dit, il frappe bien. Mais il y a tellement d’autres moyens de blesser quelqu’un que s’il peut se passer de ça il le fait. Parait que ça lui est arrivé une seule fois de défigurer une personne au point qu’elle ne soit plus reconnaissable et qu’elle ne puisse pas faire autrement que se traîner au sol. Et il parait aussi que ça l’a marqué, et qu’il a pas spécialement aimé, alors depuis, il envoie les autres. Pour en revenir à mon point, je disais qu’il est du genre rancunier. Et il a la rancune assez tenace d’ailleurs. Avec lui, c’est œil pour œil, dent pour dent. Faut pas se fier à sa gueule de M’sieur Relax quand tu sais que t’as fait un truc qui lui a pas plu.
Y a que comme ça qu'il pourra tenir la route de toute façon.
Elle
Kyle. Akira. Rien que pour ça, mon frère est compliqué. Oh évidemment, je le comprends. Il tient à son nom. Pas celui qui lui vient du vieux. L’autre. Kyle. A part moi, personne ne l’appelle comme ça, il ne le permet pas. Le sauvage serait capable de vous frapper pour avoir essayé. Raison pour laquelle tout le monde le connaît sous le nom d'Akira, même si sur les papiers, ce n'est pas ça. Parce qu’il donne tout un sens à toute chose, et en particulier à son prénom. Kyle. Ce n’est pas qu’il n’aime pas. Mais il a beaucoup de mal. Parce que Kyle, ça lui vient de Kyliann. Et Kyliann, c’était notre mère. Quand on voit mon frère comme ça, on a bien trop souvent l’impression que rien ne l’atteint, que tout lui passe au-dessus de la tête sans qu’il n’y accorde le moindre intérêt. Pour beaucoup de choses, c’est vrai. Mais pas quand on touche à sa famille. Et en particulier à Maman. Je crois, je suis sûre même, qu’il ne s’est toujours pas remis de son décès. D’aucun décès d’ailleurs. À aucun moment, il n'a fait son deuil. Mais le plus dur, ce doit être notre mère. Je pense qu’il lui en veut toujours. Je crois qu’il n’aime pas se souvenir en fait. Petit, il n’y avait que Maman qui l’appelait par ce prénom. Au fond, il doit encore lui réserver ce droit, et étant donné que personne à part moi n’a cette proximité avec lui, il ne laisse cette liberté à personne. Ce doit être une marque d’affection profonde pour lui. C’est peut-être sa façon de protéger ce qui lui reste de Maman. Qui sait ? Kyle a toujours été très sensible sur ce genre de chose. Même s’il refuse de le reconnaître, c’est un type sensible. Quand il a de l’affection pour quelqu’un, il fait attention à tout, surveille tout, et surtout, il est capable de tout. De tout. Alors quand j’entends dire de lui qu’il n’est rien d’autre qu’un fauve, ou un requin en affaires, je ris doucement. C’est vrai, probablement, je ne suis pas avec lui quand il bosse. Mais au fond, il est tellement plus que ça. Pourquoi sa fille l’aimerait autant s’il n’était que celui qu’on décrit ?
Ce que je dois bien admettre cela dit, c’est qu’il est passé par beaucoup de choses depuis la mort de nos parents. Et que ces choses ont fait de lui quelqu’un que je n’apprécie pas forcément parfois. Bien sûr, son comportement avec moi, Tora ou mon petit Akihiko est radicalement différent. Mais ça ne change rien au fait qu’il soit bien souvent un vrai connard. Il sait qu’il a une belle tête et il en profite. Bien. Trop surtout. Il est devenu maître dans l’art du « je me fous bien de ta gueule », un spécialiste d’une hypocrisie telle qu’une grand-mère en pleurerait en le voyant. Aucune de ses relations n’ont duré plus d’une semaine ou deux. Et il n'en est jamais ressorti blessé, pas comme avec la mère de Tora. Je ne compte plus les filles que j’ai croisées en venant chez lui qui partaient en courant, larmes aux yeux, tentant de récupérer un peu de dignité et ramasser les restes de leurs espoirs, ou les mecs qui n’attendent que de pouvoir enfin le cogner jusqu’à ce qu’il en soit défiguré – quoique, ceux-là ont toujours été moins nombreux, du moins, jusqu’à la mort de Yukino – parce qu’il les aura lâché comme des merdes mais qui en même temps ne veulent pas s’y frotter parce qu’ils savent que chaque coup sera rendu et qu’ils finiront dans le même état. Enfin… Depuis que j’ai manifesté mon animosité face à cette habitude, il s’est calmé et ne se bat plus, à ma demande. Quoi qu’il en soit, je ne sais pas pourquoi il traite ses relations de la sorte. Toujours est-il qu’il en est détestable. Il tire une sorte de plaisir à blesser les autres. Je pense que c’est l’expression de quelque chose au fond, mais je ne sais pas quoi.
Kyle, c'est Monsieur Tout Le Monde, un vrai. Passez un peu de temps avec lui, et vous aurez vite cette impression qu’il semble connaître tout le monde, peu importe le milieu. Je pense que c’est dû au fait d’avoir eu à développer des contacts, et puis avec Tora aussi, quand on est parent, on commence à vite connaître des gens. Enfin, tout ça pour dire qu’il est très sociable comme bonhomme. Ouvert à toute chose, à l’aise sur n’importe quoi, c’est le genre à parler de tout et de rien comme ça avec un inconnu dans la rue. Il y a des jours encore où je m'étonne de cette facilité à sociabiliser. Fût un temps où ce très cher Kyle n'ouvrait pas la bouche pour dire un mot à qui que ce soit. Il a été très taciturne, mais voilà quelque chose qui a radicalement changé depuis.
Et puis Kyle, c’est aussi des choses qu’il cache. Des douleurs que j’ai dû apaiser parce qu’il était incapable de s’en sortir tout seul sans partir à la dérive, par exemple. Il n’y a eu qu’une situation de ce genre après Yukino, la mère de sa fille. D’ailleurs, aujourd’hui encore, il se sent responsable de sa mort, et de celle de son mari, par extension. Il sait bien qu’il ne pouvait pas deviner, qu’elle ne lui avait rien dit, qu’elle avait probablement fait son choix avant de venir lui abandonner Tora. Il ne pouvait pas savoir, mais pour lui, deux personnes sont mortes par sa faute. De ce fait, ai-je besoin de préciser qu’il voue un amour fou à l’Incontestable et toutes ses règles ? Bien sûr, ce n’est pas uniquement pour le mal que ça lui a causé. Avant ça il avait déjà ses propres convictions sur le système. J’en ai depuis peu la même vision que lui. Une suite de zéro et de un que l’être humain ne saisit pas, une logique inhumaine, mécanique, vide de sentiments, de toute aptitude à se lier d’affection à qui que ce soit mais qui se croit capable d'améliorer des relations humaines. Un système qui prétend connaître chacun des habitants du pays pour former des couples soi-disant compatibles, soi-disant, parce que les sentiments ne se développent pas comme ça en un clic et une enveloppe rose. Parce qu’on n’aime pas un inconnu au premier coup d’œil, en particulier lorsqu’on est soumis à la menace. Et parce que ce système ne fait qu’éloigner un peu plus des gens qui ne se seraient probablement pas rapprochés un jour. Kyle n’aime pas qu’on lui dicte la conduite qu’il doit suivre. Cette forme de dictature, comme il le dit si bien, n'est pas pour lui. Toutes ces règles, ces menaces, liées à ce qu’il ne voit comme ni plus ni moins qu’un enchaînement à durée indéterminée, je pense que le jour où elles lui tomberont dessus, il les enverra voler en l’air. Et j’espère seulement qu’il pensera à sa fille avant de décider de moisir trop longtemps en prison. Enfin… Tout ça n’a pas aidé. Le système doit probablement être l’une des raisons de son attitude de mec volage qui ne se pose pas. Et aussi le fait qu’il a trop peur de perdre à nouveau des gens pour oser s’attacher de nouveau. Oh ça ne l’excuse pas, pas du tout même. Il reste un connard. Mais ce sont probablement les motifs de son comportement. C’est tellement moins risqué de ne pas s’attacher j’imagine. Mais ce que je déplore, c’est qu’il ne semble même pas se sentir un minimum coupable de ce qu’il fait. Ou s’il l’est, alors il le cache vraiment très bien. Mais je ne crois pas que ce soit le cas.
Il y a d’autres choses à dire. Des choses moins sérieuses, plus banales. Comme le fait qu’il ne supporte absolument pas le désordre. Je crois que Tora est la petite fille la plus ordonnée que je connaisse à cause de lui. Le désordre le frustre rapidement. Presque autant que de devoir faire la poussière, parce qu’il est allergique aux acariens. Comme tout le monde, mon frère a ses rêves, ses envies, ses phobies. Il ne vous dira jamais qu’il rêve de quoique ce soit. D’ailleurs, je le dis, mais le fait est que je ne suis pas certaine qu’il ait réellement un rêve… Enfin, quoi qu’il en soit, il n’est pas le type lambda qu’on croise dans la rue, je vous l’accorde, mais il n’est pas le géniteur de l’Incontestable non plus. Pas banal, mais pas centre de l’attention non plus. Parce que de façon générale, il essaie de ne pas trop se faire remarquer. Avec la famille que nous avons, et tout ce qui en découle, tout ce qu’il a pu bâtir, honorable ou non, ne lui est jamais attribué. Aux yeux de tous, Kyle ne doit son réseau qu’à l’Inagawa-kai. On l’associe toujours aux yakuzas, au Kai, et au fait qu'il soit un Inagawa, alors que tout ce qu'il a obtenu et fait, il l'a eu et accompli par ses propres efforts. Au nom du clan certes, mais toujours est-il qu'il a fait comme tout ceux qui voulaient entrer, que ça n'avait rien de simple, ce n'était pas posé sur un plateau d'argent juste parce qu'il portait le nom Inagawa, et je pense que ça le frustre. Bien sûr qu’il a des connaissances dans le milieu, puisqu’il y évolue. Notre grand-père a malgré tout eu son influence sur lui, on ne peut pas le nier. Mais tout ce qu’il a, il l’a obtenu au prix d'efforts, et pas uniquement de relations. Je pense que ça explique sa fierté surdimensionnée et son acharnement au travail. Et également sa façon de travailler, en dehors de son emploi comme consultant commercial.
Des atouts, des défauts. Oui. Comme vous et moi. Mais je l’aime comme ça mon Kyle.
Kyle A. Inagawa
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PREUM’S.
RE-BIENVENUE BB ET BON REBOOT. ÇA SENT DÉJÀ BON ICI.
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KYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYLE !!!
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Omg, quelqu'un qui me connaît mais que je ne reconnais pas ?
Qu'est-ce vous avez tous à changer de tête en mon absence hein ?
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Si je te dis "Karl", tu reconnais ? ... j'ai eu la flemme de changer de compte... et mes dc sont tous dans mon profil
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Yay, on l'attendait ce comeback darling
Bonne rédaction
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Marek > omg TU T'ES BIEN CACHÉ ! DANS MES BRAS
Daiki > uiui, il est pas resté longtemps mais il était là l'année dernière o/
Hyun > Thanks Bah oui, fallait bien qu'il puisse au moins s'exprimer lui aussi !
Daiki > uiui, il est pas resté longtemps mais il était là l'année dernière o/
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Le titre de ton physique m'a fait penser à ça :
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J'aimerais demander un délai siouplait
Je pensais avoir mon week-end mais non, je vais le passer à l'école donc pas moyen de finir pour le 10
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Je peux demander une seconde extension pliiz ? J'ai bien avancé mais finalement, ca me prend un peu plus de temps que ce que j'imaginais, et j'en ai pas eu énormément cette semaine du temps (btw, c'est la fin de mon absence ). Peut-être que j'en aurais pas pour longtemps, mais dans le doute, je préfère demander un délai.
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- [22:06:43] Luz E. Alvadaro : "Le RP plus une passion, une profession" "Makoto Nanase 2017"
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J'ai fini !
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Analyse de fiche
Le staff de Just Married te souhaite la bienvenue sur le forum !
Introduction
Re-bienvenue sur le forum ! Histoire
Moi, je tapais plus dans le poil de carotte, Mérida. → T'es tellement sexy avec les cheveux frisés, les robes et la voix féminine
je me retrouve à l’écart à cause de mon apparente rousseur. → Je sais que les enfants peuvent être cruels mais avec les changement génétiques qui font que certains ont les cheveux roses, bleus, rouge, violet, etc, le roux passe limite inaperçu
Personne ne savait s’il fallait l’incinérer ou pas comme elle n’était pas japonaise. Tout le monde se disputait pour des broutilles. Et quand il a finalement été décidé qu’on enterrerait ses cendres, la question du lieu est revenue sur la table. → Elle a pris la nationalité japonaise vu qu'elle vivait au pays et qu'elle a même été mariée par l'Incontestable. Du coup, la question ne se pose pas, c'est l'incinération.
à cause de ma démarcation physique. → Ce sera peut-être à modifier selon ce que tu mettras concernant les raison de l'harcèlement.
Caractère
Validé !
Physique
Validé !
Conclusion
C'était long mais ça s'est lu comme de rien. Bon courage pour les modifications ! En cas de problème, de doute, n'hésite pas à contacter un des membres de l'administration, nous serions ravis de te venir en aide ! :)
Analyse : 1/3
Nous analysons au maximum trois fois une fiche, après cela, si nous ne pouvons toujours pas la valider, nous serons malheureusement obligés de la refuser. Nous ne pouvons nous permettre de reprendre chaque fiche dix ou vingt fois, cela serait autant pénible pour vous que pour nous. Merci de votre compréhension.
Kao râle en #9900ff
Kaori Mogami
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N'est-ce pas que je suis sexy
J'ai balancé les modifs à chaud là tout de suite, en espérant que ça aille, sinon j'y réfléchirai mieux plus tard. As in, après avoir dormi
"Donc tu vois, moi je me pointe tout bien habillé à l’école – dès mes trois ans d’ailleurs, je ne remercierai jamais assez ma mère – et d’office, je me retrouve à l’écart à cause de mon apparente rousseur, mon apparence qui me donne un genre indéfini – ça m'a rendu audacieux, je peux te l'assurer, les débuts de l'exhibitionisme –, et qui montre clairement que je ne suis pas à cent pour cent du pays."
" Personne ne savait où il fallait l'enterrer, vu que le vieux avait donné son veto, mais que sa famille voulait qu'elle soit enterrée là où irait le reste de sa famille au Japon, le cimetière Ingawa donc. Tout le monde se disputait pour des broutilles. Et quand ils se sont retrouvés avec l'urne contenant ses cendres entre les mains, la question du lieu est revenue sur la table."
"Celui qui voulait dire « Désolée, j'ai mal pour toi » comme à l'époque où j'étais victime de harcèlement à l'école quand on était gosse à cause de ma démarcation physique – c'est fou ce que les gens peuvent être méchants quand ils sont incapables de définir ce que tu es. La phobie de la différence."
J'ai balancé les modifs à chaud là tout de suite, en espérant que ça aille, sinon j'y réfléchirai mieux plus tard. As in, après avoir dormi
"Donc tu vois, moi je me pointe tout bien habillé à l’école – dès mes trois ans d’ailleurs, je ne remercierai jamais assez ma mère – et d’office, je me retrouve à l’écart à cause de mon apparente rousseur, mon apparence qui me donne un genre indéfini – ça m'a rendu audacieux, je peux te l'assurer, les débuts de l'exhibitionisme –, et qui montre clairement que je ne suis pas à cent pour cent du pays."
" Personne ne savait où il fallait l'enterrer, vu que le vieux avait donné son veto, mais que sa famille voulait qu'elle soit enterrée là où irait le reste de sa famille au Japon, le cimetière Ingawa donc. Tout le monde se disputait pour des broutilles. Et quand ils se sont retrouvés avec l'urne contenant ses cendres entre les mains, la question du lieu est revenue sur la table."
"Celui qui voulait dire « Désolée, j'ai mal pour toi » comme à l'époque où j'étais victime de harcèlement à l'école quand on était gosse à cause de ma démarcation physique – c'est fou ce que les gens peuvent être méchants quand ils sont incapables de définir ce que tu es. La phobie de la différence."
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Cette fiche looooooooooooooooooooooooooooooongue !
Bienvenue, bg
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Ptdrrr oui /o/
Thanks tho
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C'est bon pour moi. Amuse-toi bien avec ton bonhomme 2.0 o/
• De réserver votre avatar ; Réservation avatars
• Si vous souhaitez trouver des partenaires pour vous lancer, n'hésitez pas à faire un tour par ici !
• Dans l'ordre, vous pouvez faire une demande de conjoint ici, ensuite vous faites une demande d'habitation ici et enfin, vous pourrez valider votre mariage ici.
• De faire un peu de pub autour de vous pour le forum et de voter régulièrement aux tops sites.
Tu es validé(e) !
Toutes mes félicitations, votre fiche est validée !
N'oubliez pas :
• De remplir les champs de votre profil.• De réserver votre avatar ; Réservation avatars
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& Surtout, AMUSEZ-VOUS !
Kao râle en #9900ff
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