How, un péquenaud ! - Priya

Un début de vie plutôt… Mal barré. À vrai dire, il s’en était fallu de peu pour que la petite Priya soit abandonnée à l’orphelinat. Pourquoi ? Parce qu’elle est ce genre « d’accident » que regrettent souvent certains parents. Mais, pour le coup, on ne pouvait pas dire que sa mère n’était pas au courant des risques. Qui va s’envoyer en l’air avec le premier venu sans se protéger ? Surtout si on ne veut ni enfant, ni maladie ? C’était quelque chose qu’elle n’avait toujours pas compris, même après avoir fêté ses 24 ans.

Il faut savoir que sa mère était une jeune, pas encore mariée et qui cherchait juste à passer du bon temps sans se prendre la tête, et là, il y avait du sang neuf : un homme, un Indien plus précisément. Après quelques verres et quelques rencontres, les deux se sont retrouvés pour faire leur petite affaire, évidemment sans la moindre protection parce que : ça ne tombera pas sur nous, pas pour une fois.

Connerie.

Qui peut penser comme ça, avec autant de sérieux ?! Surtout que… eh bah ce genre d’accident n’arrive pas qu’aux autres et les deux inconscients s’en sont bien vite rendu compte. À la base venue pour le travail, Darshan n’imaginait pas devenir père, mais il était totalement prêt à assumer cet enfant contrairement à sa partenaire qui parlait de le laisser à l’orphelinat. Darshan était un peu énervé en entendant cette nouvelle. Dans ce cas, pourquoi ne pas simplement avorter ? D’après ce qu’il savait, ce n’était pas interdit, ni même impossible alors pourquoi ne pas simplement y avoir recours ? Simplement parce que sa partenaire n’était pas pour cette pratique, l’associant à un meurtre.

C’est vrai qu’abandonner son enfant à la naissance est tellement mieux.

Darshan eut le choix entre trois options : finir son travail et repartir, la même option, mais en repartant avec la gamine, ou alors, simplement rester ici sachant qu’elle aurait forcément la puce d’une manière ou d’une autre. Que laissait-il derrière lui, s’il restait ici pour sa fille ?

Il fit des nuits blanches à réfléchir, voyant la fin de son mandat arriver et aucune véritable solution.

La décision fut prise, pas forcément la plus facile à faire, mais sans doute la meilleure pour sa fille. Dès son retour en Inde, il prépara sa naturalisation. En s’y prenant maintenant, il pourrait demander sa mutation, faire ses papiers tranquillement et faire tout le nécessaire. Il avait déjà passé plusieurs mois au Japon et son casier était totalement vide. Même si les procédures ne duraient pas si longtemps, il espérait être présent pour la naissance de sa fille.

Et ce fut le cas, il put voir sa fille naître le 9 juin 2090, avant que la mère de la petite ne disparaisse simplement.

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Darshan fut remarié assez vite, à un homme cette fois, et ça ne le dérangeait pas même si c’était plutôt perturbant, de ne pas avoir le choix. Il fallait cependant avouer qu’il était bien tombé, l’alchimie était extraordinaire avec son nouveau compagnon dont il reprit le nom de famille. Ça donnait un mélange assez amusant, un prénom indien et un nom japonais pour sa fille… Qui était d’ailleurs assez loin du physique de sa mère.

La famille filait le parfait amour, Priya était chérie et proche de ses pères, se moquant de l’absence de mère. Darshan lui avait expliqué assez tôt, mais dès qu’elle fut en mesure de comprendre. Bah, écoutez, si sa mère ne voulait pas d’elle, la jeune fille ne serait pas celle à la rechercher vu son incapacité à assumer sa connerie. Tant pis hein. En plus, Darshan lui apprenait pas mal de chose pour se débrouiller seule et des petites astuces de bricolage.

Plutôt travailleuse, elle n’hésitait pas à donner un coup de main à ses pères, se rendant utile tout en travaillant au maximum ses cours. On lui avait toujours dit que c’était important d’avoir des bonnes notes, et c’était resté… Un peu plus d’une dizaine d’années.

Ce fut en seconde année de lycée que les choses changèrent. En plus d’un changement radical de cercle amical, ses habitudes scolaires changèrent également. Elle ne faisait plus que le strict minimum, ayant complètement abandonné son envie d’aller à la faculté. Que pouvait-elle bien y faire ? Mettez ça sur un gros raz-le-cul d’être la tête dans les livres, d’écrire et de prendre des cours supplémentaires pour prendre de l’avance. Priya n’en pouvait simplement plus de tout ça ! Elle avait envie de faire des choses juste pour elle, pour se changer les esprits et simplement profiter de sa jeunesse. Elle n’allait pas faire comme certains de ses anciens amis, à aller coucher à droite et à gauche, mais plus faire des activités en extérieur, s’amuser sans penser au lendemain. Et passer du temps avec ses nouveaux amis.

Ces derniers l’initièrent à l’air soft et au paintball, chose qu’elle apprécia énormément. C’était un sport simplement génial, un sport qu’elle aimait énormément d’ailleurs ! Elle resta avec la même équipe jusqu’à la fin du lycée, étant toujours avec eux même quelques années plus tard. Contre toute attente, elle eut son certificat de fin d’études bien que ce dernier ne lui servirait pas vraiment. Après deux ou trois mois de galère, les parents d’un de ses amis lui offrirent une place en tant qu’apprentie dans leur garage. Tout n’était pas forcément légal, mais elle avait appris pas mal de choses plus ou moins utiles comme s’occuper d’un moteur, changer des pièces et s’occuper de tous les liquides d’une voiture et autre véhicule motorisé. Très précautionneuse, personne n’avait à se plaindre de son travail, à tel point qu’elle pourrait reprendre l’affaire lorsqu’elle aurait l’âge.

En parallèle, le petit groupe d’amis faisait les quatre cents coups, du genre à aller embêter un groupe voisin, voler à l’étalage ou créer quelques bagarres, attirant parfois trop l’attention sur eux. Que ça soit de la police ou d’autres personnes plus mal intentionnées. Avoir des problèmes faisait partie de leur quotidien, et beaucoup s’en amusait. Priya la première qui ne se sentait pas plus concernée que ça. Le petit groupe parlait également beaucoup de l’Incontestable et des Incontrôlables, échangeait pas mal dessus. Certains d’entre eux connaissaient des gens qui étaient à fond derrière les Incontrôlables, d’autres qui les trouvaient un peu ridicule de prendre autant de risques pour un si petit résultat bien que le Big Bang Kiss avait marqué les esprits à cause des explosions.

Tout le monde respectait l’avis des autres et personne ne se jugeait. Pour sa part, Priya n’était pas totalement pour, ni même totalement contre. Comme tout, les options ne sont pas toutes blanches ou toutes noires. D’après elle, l’Incontestable devrait être là pour aider, pas pour imposer. Certes, ça perdrait de son intérêt, mais pourquoi briser des couples ? Certaines personnes tombent amoureuses et se retrouvent séparées de leur âme-sœur pour un parfait inconnu. Quel est le véritable intérêt ? Rendre malheureux pour faire « survivre le pays » ?

Connerie et débilité. La chose qu’elle espérait, c’était que l’Etat se soumettait également à l’Incontestable et ne faisait pas semblant.

Les choses s’enchaînèrent dès l’année 2109, et, si certaines choses lui plaisaient, d’autres ne la ravissaient pas comme son mariage et les événements de Shukumei. Cette année, en plus de perdre sa liberté, elle perdit un de ses plus proches amis, lui apportant un véritable coup de massue. Ce dernier avait été emporté par les vagues, n’étant retrouvé que quelques semaines plus tard. Le choc fut terrible, à tel point qu’elle ne fut pas capable de travailler correctement avant plusieurs semaines, manquant de perdre son emploi. Cela aurait pu être le cas si son patron n’avait pas eu un minimum d’empathie.

À la maison, elle n’avait aucun soutien émotionnel, comme si son mari actuel se moquait d’elle au plus haut point. Pourquoi ce n’était pas lui, qui avait été emporté ? Elle était en colère contre le monde entier, ne sachant pas comment l’algorithme avait pu les trouver compatibles. Aucun point commun, aucune discussion… Rien. Ce fut la première fois qu’elle remit en cause l’Incontestable, mais sans doute la dernière vu que leur mariage ne dura pas longtemps, pas plus de deux ans. Pourquoi ? Tout simplement parce que son mari profita du bug de l’année 2111 pour aller voir ailleurs. Priya s’en moquait totalement, voyant sa présence comme étant un véritable fardeau.

Elle ? Bon, inutile de mentir, elle alla voir ailleurs également, redécouvrir les plaisirs de la chair avec une femme. Quelle horreur de ne pas être satisfaite dans sa sexualité. Se retrouver avec un homme ne lui faisait pas plaisir et était totalement contraire à son orientation. Comment être satisfaite dans ces circonstances ?

Comme s’il ne se passait pas encore assez de choses depuis deux ans, une épidémie décida de pointer le bout de son nez, apparaissant en un claquement de doigts. Beaucoup de personnes tombèrent malades, mais pas Priya. Pas parce qu’il s’agit d’une guerrière, mais plus parce qu’elle avait eu de la chance, passant entre les mailles du filet.

Et puis pour ne pas véritablement arranger les choses, les puces commencèrent à défaillir, son mari saisi l’opportunité pour disparaître de la ville… L’espace deux semaines avant d’être rattrapé par la milice.

Karma.

Cependant, ça avait été un véritable soulagement pour la jeune femme, surtout qu’après cet événement, l’Incontestable décida qu’ils n’étaient plus si compatibles que ça et les fit divorcer. Ce fut une grande renaissance pour Priya, bien qu’il fallait désormais se refaire injecter une nouvelle puce. Elle avait toujours écouté l’Incontestable, sauf lorsqu’il était éteint, et sa puce était en parfait état. Pourquoi devait-elle encore suivre le mouvement ? Clairement pas motivée, elle se la fit injecter, redevenant célibataire à son plus grand plaisir !

Une petite chose positive malgré tout, elle put reprendre les rênes du garage. Avec un peu de chance, elle aurait pas mal de temps avant son prochain mariage… Et avec une personne plus compatible.